Thelma a quinze ans et elle porte des vêtements en taille 25. Obsédée par son poids et tout ce qu’elle avale, elle enchaîne les séances de sport, mais elle sait qu’en dessous de 40 kilos, c’est l’hospitalisation, impossible d’y échapper. L’adolescente est suivie par un médecin et par un psy. Elle veut guérir, mais l’Entraîneur impose sa loi .« Les exigences de l’Entraîneur régissent, depuis dix-huit mois, la vie de Thelma. De manière aussi imperceptible qu’inexorable, le nombre de lois à respecter s’est accru. Aucune contrainte, prise isolément, n’apparaît insurmontable ; aucun refus n’est recevable. » (p. 15) Pour aller mieux, elle envisage un plan simple : coucher avec un garçon pour se remettre sur les rails d’une vie normale. Elle jette son dévolu sur son professeur de sport, mais ce dernier a d’autres plans pour elle : il veut qu’elle fasse du sport pour de bonnes raisons, et pas dans un objectif morbide. « Thelma n’a pas besoin qu’on l’empêche de se tuer, elle a besoin qu’on ne l’empêche pas de vivre, qu’on arrête de la ménager et de l’emballer dans du coton. » (p. 110)
L’anorexie mentale est présentée sans angélisme ni misérabilisme, comme la terrible maladie qu’elle est. Elle consume Thelma à petit feu et elle affecte par contagion pernicieuse toute sa famille. La guérison est forcément un cheminement périlleux, surtout parce qu’il faut déconstruire des habitudes et des certitudes délétères. « Le manque n’est pas là où ils croient : elle ne manque pas de carburant, c’est le manque lui-même qui constitue le carburant. Les aliments lui sont des sédatifs poisseux, des poisons hallucinogènes à diffusion lente qui endorment son corps et lancent son cerveau dans une course éperdue. » (p. 64 & 65) Je ne connais rien à cette maladie et je ne sais pas dans quelle mesure l’intrigue est réaliste. Toutefois, pour souffrir (dans une moindre mesure que Thelma) d’un manque de confiance en mon physique (et d’un dégoût certain pour mon apparence), je sais que ma pratique du sport est une branche que je ne dois pas lâcher. Voir que mon corps peut réaliser des efforts et atteindre des objectifs, ça nourrit un peu ma fierté personnelle.
Lu dans le cadre du Prix Sport Scriptum 2023.