« Ah, il en aura fait du mal à ceux qui l’ont entouré ! Tant pis pour eux, ils n’avaient qu’à pas être là ! » (p. 10) Paul Verlaine est un vieil homme sans le sou, malade et harcelé par deux amantes rivales qui lui soutirent des poèmes qu’elles revendent ensuite à Vanier, l’éditeur du poète. Même au pire de la déchéance, l’artiste reste superbe, en dépit des attaques narquoises de François Coppée, académicien dont les œuvres s’arrachent. Heureusement, Verlaine compte encore quelques soutiens, notamment le jeune Henri-Albert Cornuty, venu à pied de Béziers pour rencontrer son idole. Un étrange engouement naît autour du vieux poète. « La jeunesse estudiantine séchait les cours de droit et de lettres classiques pour aller vers ce révolté contre les conventions civiles et poétiques. » (p. 141 et 142) Alors que le pauvre Lelian (anagramme de Paul Verlaine) passe de la prison à l’hôpital et de l’hôpital à une pauvre chambre dans un taudis, Henri-Albert protège son maître des mauvaises critiques et des vilaines gens. « En tout cas, depuis que ce gosse est arrivé à Paris… […], vaut mieux ne pas toucher à Verlaine. » (p. 210)
Jean Teulé s’y entend pour faire revivre les poètes maudits. Après avoir beaucoup apprécié Je, François Villon et Héloise, ouille !, j’ai suivi avec plaisir et émotion les dernières semaines de Paul Verlaine. « C’est le seul génie poétique de cette fin de siècle. Il côtoie de si près le rivage de la poésie qu’il risque à tout moment de tomber dans la musique. » (p. 46) Quelques-uns de ses poèmes émaillent le roman et leur mélodie est inimitable et inoubliable. Si je vous dis « Les sanglots longs des violons de l’automne… », vous répondez ?
Me reste à lire Rainbow pour Rimbaud où Jean Teulé explore le destin de ce poète fulgurant, dont il ne fait que mentionner le nom dans Ô Verlaine !.