Billevesée du dimanche #74

Savez-vous pourquoi le médecin vous demande de dire 33, et pas un autre nombre ?

Il se trouve qu’en prononçant ce nombre, vous produisez des sons graves qui résonnent dans la cage thoracique. Armé de son stéthoscope, le médecin peut ainsi entendre plein de choses à l’intérieur de votre corps. Ne me demandez pas quoi, c’est déjà un miracle que j’arrive à vous sortir une information à base de chiffre !

Alors, billevesée ?

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Paradis 05-40

Roman de Charles Dellestable.

1940. Nina, Paul, Oscar et Gaby sont quatre amis, quatre Parisiens artistes qui, chacun à leur manière, ont l’honneur des affiches. Mais les paillettes ne font pas le poids face aux bombes. L’Allemagne vient d’attaquer la France et partout, c’est l’exode. « Je vois des gens affligés d’être des émigrés dans leur pays. » (p. 205) Pour les quatre inséparables, le salut est à New York. Mais avant l’Amérique, il y a toute la France à traverser à bord d’une Bugatti qui n’ira pas plus loin que le Périgord. Le quatuor vient bousculer la vie recluse d’Hélène et de ses enfants, Diane et Maurice, malades d’attendre des nouvelles du front. L’espace de quelques jours, tout ce monde va cohabiter et s’aimer dans le domaine du Paradis. « Nous avons formé une famille dénuée du moindre lien de parenté, unie par la simple joie d’être joie d’être ensemble. » (p. 158) Parce que la guerre, même inévitable, peut reculer un instant si on choisit de ne pas y penser pour célébrer la vie, une fête d’anniversaire va être l’occasion de créer des souvenirs précieux, mais aussi d’apprendre à grandir.

2011. Maurice est un vieux monsieur qui a choisi de se taire parce qu’il oublie comment parler. « L’amnésie des mots, c’est moche. » (p. 15) Nathalie, son auxiliaire de vie, aime écouter les vieux messieurs raconter leur histoire et ce n’est pas le caractère bougon de Maurice qui va l’arrêter. « Je l’imaginais snob, il me croyait illettrée. Idéal pour nouer le dialogue. » (p. 26) Pour sortir Maurice de son silence, Nathalie ouvre une discussion en couleurs sur une ardoise blanche. Le vieil homme est conquis et lui met entre les mains le journal de jeune fille de sa sœur, agrémenté de ses propres réponses. D’auxiliaire, Nathalie devient lectrice de vie et elle raconte à Maurice sa propre histoire, celle qui échappe de la mémoire du vieil homme. « Racontez-moi mon enfance, Nathalie. » (p. 41)

Sur deux époques, l’auteur remonte l’Histoire pour créer son histoire. Avec la mémoire de Maurice comme palimpseste dont il soulève délicatement chaque feuille de papier de soie, Charles Dellestable signe un premier roman très réussi. J’ai particulièrement apprécié l’aspect polyphonique et multisupport du texte, comme si une seule voix ne suffisait pas à tout dire. L’histoire est grave, c’est certain : qu’il s’agisse de l’exode de 1940 ou de la mémoire en fuite de Maurice, il est question de naufrage. Mais grave ne veut pas dire pathétique, tout comme nostalgique ne veut pas dire triste. L’auteur évite ces écueils et manie avec grâce un humour acidulé et pétillant comme un bonbon d’antan. J’ai une tendresse toute particulière pour le personnage de Gaby, artiste fantasque qui préfère faire comme si plutôt que faire avec.

Pour ce touchant premier roman, Charles Dellestable a reçu le prix Nouveau Talent de la fondation Bouygues Telecom. J’ai eu la chance d’assister à la remise du prix jeudi matin. Quelle émotion quand l’auteur a reçu le prix et quand il a partagé avec nous une lettre que son héroïne lui a envoyée (si si, je vous promets) ! J’ai demandé à l’auteur de dédicacer ce roman à une personne qui m’est chère et j’espère que ce roman lui plaira autant qu’à moi !

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La terre

Roman d’Émile Zola.

Ce volume des Rougon-Macquart met en scène Jean Macquart, frère de Gervaise, mais il est surtout question de la famille Fouan. Sur une quinzaine d’années, on suit la vie de Rognes, petit village de la Beauce, région agricole rythmée par les travaux de la terre. « Cette Beauce plate, fertile, d’une culture aisée, mais demandant un effort continu, a fait le Beauceron froid et réfléchi, n’ayant d’autre passion que la terre. » (p. 39)

Au début du roman, le père et la mère Fouan, brisés par des années de labeur dans les champs, décident de donner leurs terres en partage à leurs trois enfants, Fanny, Buteau et Jésus-Christ, en échange d’une rente à vie. Mais les parents enragent autant de donner leur bien que les enfants étouffent de devoir partager l’héritage et d’attendre la mort des vieux pour toucher les magots cachés. « Ah ! Si l’on pouvait emporter son avoir ! […] Mais, puisqu’on ne l’emporte pas, faut bien que les autres s’en régalent. » (p. 439) Au fil des années, on assiste aux manœuvres sournoises des trois enfants pour augmenter leur part. Et il y a aussi Lise et Françoise, deux sœurs qui passent de l’adoration mutuelle à la haine absolue, à cause de la terre et à cause d’un homme. Fi des liens de sang ou de famille quand il s’agit d’augmenter son bien et de posséder la terre, toujours plus de terre. Et il n’y a que le notaire Baillehache qui tire profit de ces luttes intestines : placide, il assiste aux querelles familiales pour gagner un sou, ne pas payer une chemise et ne pas céder un arpent de terre.

Émile Zola décrit l’attachement viscéral des paysans à leurs terres, passion qui se double d’une avarice et d’une cupidité sans bornes. Sans ses champs, le paysan se sent dépossédé, diminué et humilié. Après s’être dépouillé de ses biens au profit de ses enfants, Fouan est un homme méprisé et que le village ne considère plus. « Il retombait dans le mépris, maintenant qu’il n’avait plus rien. » (p. 402) En Beauce, l’avoir fait l’homme, même s’il le tue dans le même temps. « La terre, […], mais elle se fout de toi, la terre ! Tu es son esclave, elle te prend ton plaisir, tes forces, ta vie, imbécile ! et elle ne te fait seulement pas riche ! » (p. 223) L’auteur évoque les premières mécanisations et la crise agricole, ravivant l’ancestrale lutte entre le paysan et l’ouvrier : « Si le paysan vend bien son blé, l’ouvrier meurt de faim ; si l’ouvrier mange, c’est le paysan qui crève… Alors, quoi ! je ne sais pas, dévorons-nous les uns les autres ! » (p. 143)

Dans La terre, Jean Macquart est donc un personnage largement secondaire. Contrairement à certains de ses parents, il ne présente aucun vice et se montre bon travailleur et honnête homme. On verra que ça ne lui réussira pas et que certaines canailles de la Beauce s’en sortiront mieux que lui. On sait de Jean qu’il est revenu de la campagne d’Italie et qu’il a abandonné une charge de menuisier à la ville pour vivre à la campagne. Cette nouvelle vie lui convient et la passion de la terre s’empare de lui. Mais n’étant pas du pays et venu les mains vides, il ne peut prétendre à la terre que par le mariage et malgré la considération que lui accorde le village, il reste un étranger. Et dans les terres paysannes, on aime autant que le bien ne sorte pas de la famille.

Émile Zola s’y entend pour évoquer la sensualité : elle était décadente dans La curée, au milieu de la grande serre d’Aristide Saccard. Elle était franche et délurée dans Nana. Elle était vaudevillesque dans Pot-bouille. Elle était coquette et raffinée Au bonheur des dames. Ici, elle est tellurique et profonde : de semailles en moissons, sans oublier les labours, la terre est un ventre sans cesse travaillé et fécondé, portant chaque année des épis lourds de sa future semence. La terre est un de mes volumes préférés de la saga des Rougon-Macquart : j’ai aimé la violence qui exhale de la terre et la rudesse bornée des paysans. Du grand Zola !

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La fille tombée du ciel

Roman d’Heidi W. Durrow.

Après le drame qui a détruit sa famille, Rachel part vivre chez sa grand-mère, femme à la poigne de fer, et chez sa tante, la jolie et douce Loretta. Le seul souvenir qu’elle garde de l’accident, c’est une oreille abîmée. Dans le nouvel univers qu’elle découvre, elle est la petite-fille-toute-neuve qui repart de zéro. Mais comment trouver sa place quand le racisme est latent, sournois ? Rachel est une très jolie métisse à la peau claire et aux yeux bleus et une très bonne élève qui s’attire l’inimitié de ses camarades d’école. « Je ne sais pas si le pire, c’est quand les gens se moquent de vous pour ce que vous êtes, ou quand ils n’y comprennent rien. » (p. 65) Ni noire, ni blanche, Rachel peine à construire son identité qui est d’autant plus incomplète qu’il lui manque des clés pour comprendre son passé. La vérité est entre les mains de Brick, un ancien voisin, qui connaît un secret sur le jour où Rachel est tombée du ciel. « Quand il n’y a personne pour vous contredire… la seule histoire qu’on puisse raconter, c’est celle qui finit par devenir vraie. » (p. 193)

Que j’ai aimé cette histoire de famille meurtrie et d’identité tronquée ! Le couple Nella/Roger avait pourtant tout pour faire rêver : la belle et blonde Danoise qui épouse le bel officier noir américain, c’est une love story idéale. Mais on comprend rapidement que le rêve a tourné court et que la belle romance s’est grippée. Et, au-delà, c’est la maternité qui souffre puisque Nella était une mère terrifiée à l’idée de ne pas pouvoir protéger ses enfants de toutes les menaces et de toutes les douleurs. Sous le regard des autres qui accuse et qui dénigre, Rachel doit apprendre à se construire. « Ça me rappelle cette manie des autres filles noires de l’école, qui croient toutes que je veux absolument être blanche. Elle m’appelle l’Oreo, comme les biscuits. Je ne veux pas être blanche. Parfois, je veux redevenir ce que j’étais. Je veux n’être rien. » (p. 165) Il en faudra du temps pour que la petite fille trouve sa voie et accepte de faire éclater la petite bouteille bleue qu’elle cache dans son cœur et dans laquelle elle entasse les sentiments noirs.

D’une plume fine et pudique, Heidi W. Dureow s’attache aux destins croisés de Rachel et Brick, deux enfants meurtris dont les foyers n’ont pas été des havres de paix. La révélation de l’accident qui a fait basculer la vie de Rachel est progressive. Même si l’on comprend rapidement les raisons et la forme du drame, chaque chapitre en précise les contours et les conséquences sur la vie de l’enfant. Voilà un roman à découvrir doucement, tant la charge émotionnelle est grande. La fille tombée du ciel ne vous tombera pas des mains, c’est promis !

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L’argent

Roman d’Émile Zola.

Nous retrouvons Aristide Saccard qui avait brassé tant de millions dans La curée, largement cocu et en passe d’être ruiné à la fin du roman. Nous voici 12 ans plus tard : après de sérieux revers de fortune, Saccard a tout perdu et il a dû vendre son superbe hôtel de la rue Monceau pour payer ses créanciers. Mais la rage de réussir tenaille toujours l’ancien spéculateur immobilier et c’est vers la Bourse qu’il tourne des regards avides. Hélas, il se chuchote que l’Empire court à sa fin : de prochaines élections pourraient le renverser et la guerre menace. « Est-ce que cet empire qui l’avait fait, allait comme lui culbuter, croulant tout d’un coup de la destinée la plus haute à la plus misérable ? » (p. 12) Et la Bourse est très sensible au climat politique : y entrer demande des nerfs d’acier, une solide connaissance de l’actualité, mais aussi un goût pour le jeu et le pari, surtout s’il est fou, hors normes.

Sachant ne pouvoir compter que sur lui-même, et certainement pas sur Eugène Rougon, son ministre de frère, Saccard fait fi des menaces qui planent : il lance ses dernières économies et toute son énergie dans la création de la Banque universelle, société de crédit destinée à financer de grands projets en Orient. « Rien n’était possible sans l’argent, l’argent liquide qui coule, qui pénètre partout. » (p. 154) Pour constituer le capital, Aristide Saccard attire de pauvres gens aux maigres économies, des nobles déchus rêvant de gloire retrouvée et toute une traîne de profiteurs qui espèrent d’enrichir dans la juteuse affaire.

L’homme est convaincu de sa haute intelligence financière et persuadé de faire fortune, pour une fois de façon durable. Aux quelques amis qui lui recommandent la prudence, notamment parce qu’il joue avec l’argent des autres, il répond plein de morgue qu’il connaît son métier. « Non, vous pouvez être tranquille, la spéculation ne dévore que les maladroits. » (p. 166) Et les premiers temps, la Bourse semble lui donner raison : la valeur des actions de la Banque universelle ne cesse de monter et Saccard savoure sa victoire et sa domination retrouvée sur les autres financiers parisiens. Mais la fièvre le gagne : voulant sans cesse augmenter la valeur de ses actions, il achète ses propres titres en catimini pour faire croire à une demande incessante. La manipulation est habile, mais risquée puisque l’édifice bancaire risque alors de s’effondrer sur lui-même. À cela s’ajoute une sordide histoire d’enfant naturel qui ressurgit après des années de silence.

Après La curée qui dénonçait les pratiques frauduleuses des spéculateurs immobiliers et La terre qui peignait un tableau sans concession de l’avarice paysanne, L’argent est le point d’orgue d’une fièvre de possession. Nullement échaudé ou guéri après ses premiers échecs, Saccard se laisse dominer par une obsession de richesse sans mesure. « L’argent, l’argent roi, l’argent Dieu, au-dessus du sang, au-dessus des larmes, adoré plus haut que les vains scrupules humains, dans l’infini de sa présence. » (p. 274) Dans le milieu boursier où l’argent ne se compte qu’à millions, rares sont ceux qui semblent capables de se maîtriser. Parmi eux, il y a les juifs qui, tout au long du roman, sont accusés des pires malversations et à qui l’on prête les pires desseins. Voilà hélas un cliché qui a la vie dure.

J’avais un peu peiné sur Son excellence Eugène Rougon et les longues considérations politiques sur le clientélisme. Ma lecture de L’argent a été encore plus difficile. Il faut tout de même relativiser puisque j’ai lu les 500 pages de ce volume en 3 jours, mais les descriptions de la Bourse et autres mécanismes financiers m’ont parfaitement barbée ! Heureusement, toujours aussi puissante et aiguisée, la plume d’Émile Zola sait emmener son lecteur dans une histoire où le sordide se dissimule souvent derrière les rideaux. Je ne suis pas déçue de cette lecture, mais j’en sors soulagée. Émile, mon chéri, entre amis, il ne faudrait jamais parler d’argent.

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Les New-Yorkaises

Roman d’Edith Wharton.

Pauline Manford a la cinquante très active, voire survoltée. Pour tenir le rythme des journées effrénées qu’elle s’impose, entre œuvres de charité, réceptions mondaines et obligations familiales, elle a souvent recours à des guérisseurs et autres gourous pour trouver la paix de l’âme et du corps. Divorcée d’Arthur Wyant dont elle est restée proche et avec qui elle a eu un fils, Jim, elle a épousé en seconde noces l’avocat Dexter Manford. De cette union est née Nona, jeune femme qui regarde avec un peu de mépris la folle existence de sa mère. « Elle admirait le zèle de sa mère, tout en se demandant parfois s’il n’était pas un peu frivole. » (p. 9) Jim, est mariée à la belle et futile Lita : la jeune femme ne veut rien d’autre que danser et lire l’admiration dans les yeux de tous. Et voilà qu’elle laisse entendre qu’elle pense divorcer. Convaincue que cette séparation anéantirait son fils, Pauline décide de prendre les choses en main et d’emmener tout le monde dans la villégiature familiale pour apaiser les esprits.

De fait, Pauline est incapable de rester inactive et la perspective d’une heure d’oisiveté la plonge dans des abîmes d’angoisse. « Elle enviait les femmes qui n’avaient pas le sens des responsabilités. […] Car, en ce qui la concernait, le sort du monde – le seul qu’elle connaissait –, reposait sur ses épaules. » (p. 26) Elle aime par-dessus tout se sentir utile, voire indispensable. « Ah, comme elle aimait les gens qui lui disaient : « Si vous n’aviez pas été là… » ! » (p. 22) Pauline est clairement ce qu’on appelle une control freak, une obsédée du contrôle : elle est convaincue de ses qualités d’organisatrice et même si elle brasse beaucoup d’air, elle reste intimement pénétrée de son importance. De son côté, son époux est fatigué de cette vie sans repos et vide de sens. « Sa journée avait été ce qui étaient désormais toutes ses journées : un départ avec un sentiment d’urgence, d’importance et d’autorité, et une arrivée avec une impression de futilité, de faisandé. » (p. 51) Le ver est dans le fruit : est-il si étonnant que Dexter soit tellement fasciné par Lita puisque sa femme fait si peu cas de lui ? Et comment douter que toute cette histoire finira par un drame ?

À cela s’ajoute les délicates relations de Pauline avec un parent pauvre et envahissant et les amours malheureuses de Nona avec un homme marié. « On découvrait maintenant que la reconnaissance pouvait prendre des formes plus importantes que l’ingratitude. » (p. 227) Mais voyez la perversité du raisonnement : Pauline se gargarise de sa propre charité et fait mine de détester les importuns qui remercient trop fort, mais elle détesterait qu’on ne fasse pas état de sa générosité. Pauvre femme riche…

Quelle étrange expérience de lecture. J’avais découvert ce roman au début des années 2000 et je l’avais vraiment apprécié. Il ne m’en restait qu’un souvenir vague et je pensais retrouver le même plaisir avec cette relecture. Il n’en est rien : les personnages m’ont agacée et la frénésie à laquelle se livre Pauline Manford est tout à fait détestable. Aucun doute, il faut être riche, très riche, pour mener une telle existence. Lita, présentée comme futile, a au moins l’honnêteté de ne pas s’encombrer de responsabilités dont personne n’attend qu’elle les assume. Égoïste, peut-être, mais pas intrusive, au contraire de Pauline qui a fait de l’ingérence un art qui me l’a rendue odieuse.

Dernier point, je ne comprends pas le titre original Twilight Sleep, mais le titre français n’est pas vraiment plus éloquent. Il laisse à penser que Pauline, Nona et Lita incarnent les différentes facettes de la femme new-yorkaise. Mouais, pas convaincue ! D’Edith Wharton, j’ai préféré, et de loin, Chez les heureux du monde.

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Adrien le lapin

Album d’Antoon Krings.

C’est le printemps et Mireille la petite abeille est fort occupée à compter toutes les fleurs du jardin. Mais que voit-elle, entre deux pétales ? Un petit lapin en chocolat qui porte un joli noeud jaune autour du cou. Et ce n’est pas n’importe quel lapin : c’est le lapin de Pâques ! Il doit se cacher des monstres qui parcourent le jardin. « D’abord, ils nous attrapent en poussant des cris de joie, puis ils nous secouent dans tous les sens pour savoir ce que nous avons dans le ventre, et même s’ils nous couvrent de mille baisers, ils finissent toujours par nous croquer. » Mais il semble que le pauvre Adrien a plus à craindre de Benjamin, le nain de jardin…

On ne présente plus Antoon Krings qui a si bien su croquer les animaux et les insectes dans une collection de très jolis petits albums carrés. En entrant ici dans le monde des héros imaginaires de l’enfance, il fait d’une pierre deux coups. Adrien est un petit lapin fort appétissant, mais si vous le croquez, vous ne trouverez plus personne pour déposer des chocolats devant votre porte le jour de Pâques. Les dessins de Krings sont naïfs, très colorés et dynamiques : un régal pour les yeux, sans conséquence sur les quenottes, ni sur les poignées d’amour.

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Quelques albums avec des lapins

1, 2, 3, 4 lapins… Pourquoi se priver ? Et il faut bien que je rende hommage à mon totem…

Au lit, petit lapin !

Album de Gaby Hansen et Jane Johnson. Adaptation en langue française de Sandrine Rogeon.

Maman Lapin a réussi à coucher ses cinq petits lapins et elle aimerait bien aller dormir. Mais il semble que le plus jeune des lapereaux n’a pas sommeil. Maman lui fait un gros câlin, lui donne un bon bain et lui prépare un lait chaud. « Un gros câlinou, oui, oui oui, dit petit Lapin, mais “bonne nuit”, ça, non non non ! Il veut profiter de sa maman, encore et encore… » Combien faudra-t-il de lapinoucâlins et de lapinoudoudous pour que petit Lapin retourne au lit et que Maman Lapin puisse enfin dormir ?

Cet album est idéal pour le coucher des tout petits. C’est presque un objet doudou tant sa couverture est douce sous les doigts. Les dessins sont tendres et ont le rendu délicat des peluches. Les couleurs sont tendres et chaleureuses. Entre aquarelles et teintes estompées, l’image est vraiment très jolie et l’histoire est charmante à souhait. Bonne nuit, petit lecteur !

Adrien le Lapin

Album d’Antoon Krings.

C’est le printemps et Mireille la petite abeille est fort occupée à compter toutes les fleurs du jardin. Mais que voit-elle, entre deux pétales ? Un petit lapin en chocolat qui porte un joli nœud jaune autour du cou. Et ce n’est pas n’importe quel lapin : c’est le lapin de Pâques ! Il doit se cacher des monstres qui parcourent le jardin. « D’abord, ils nous attrapent en poussant des cris de joie, puis ils nous secouent dans tous les sens pour savoir ce que nous avons dans le ventre, et même s’ils nous couvrent de mille baisers, ils finissent toujours par nous croquer. » Mais il semble que le pauvre Adrien a plus à craindre de Benjamin, le nain de jardin…

On ne présente plus Antoon Krings qui a si bien su croquer les animaux et les insectes dans une collection de très jolis petits albums carrés. En entrant ici dans le monde des héros imaginaires de l’enfance, il fait d’une pierre deux coups. Adrien est un petit lapin fort appétissant, mais si vous le croquez, vous ne trouverez plus personne pour déposer des chocolats devant votre porte le jour de Pâques. Les dessins de Krings sont naïfs, très colorés et dynamiques : un régal pour les yeux, sans conséquence sur les quenottes, ni sur les poignées d’amour.

Petit Lapin perdu

Album d’Harry Horse.

Aujourd’hui, c’est l’anniversaire de Petit Lapin. Il reçoit plein de cadeaux, dont un superbe ballon rouge. Papa et Maman décident d’emmener toute la famille au parc d’attractions et Petit Lapin est fier d’ouvrir la marche. Il est un grand lapin aujourd’hui ! « Quand ils sont à l’intérieur du parc, Petit Lapin a du mal à se décider : par quoi commencer ? Il voudrait aller sur toutes les attractions en même temps. » Mais à force de gambader à toute allure dans le parc, il a perdu de vue sa maman. Le voilà tout penaud, seul avec son gros ballon rouge…

Cet album gronde gentiment les enfants qui voudraient grandir trop vite. Heureusement, tout est bien qui finit bien ! J’ai été subjuguée par la double page qui présente le parc d’attractions ! Rien ne manque : grande roue, montagnes russes, bateau pirate, manège à fusée, piscine, baraque à bonbons, etc. Pas étonnant que Petit Lapin ait eu envie de tout voir, au risque de lâcher la main de sa maman. C’est un bel album aux couleurs éclatantes, surtout le ballon rouge qui, présent à chaque page, permet de reconnaître Petit Lapin au milieu d’autres lapins.

Le lapin facteur

Album d’Olga Lecaye et Nadja.

Martin le lapin est le facteur de la forêt : sur son vélo rouge, il distribue le courrier à tous les habitants. Mais voilà qu’un matin, le courrier a disparu. Honteux, Martin décide de quitter la forêt et de disparaître. Hélas, son chemin croise celui de la Sorcière Blanche, réputée pour manger les petits animaux. C’est elle qui a dérobé tout le courrier des habitants de la forêt. Martin en est persuadé, il va se faire dévorer ! Et pourtant… si tout ce qu’on raconte sur la Sorcière Blanche n’était pas vrai ? Et s’il suffisait d’une lettre pour donner du bonheur ? « Chère sorcière, merci pour cette charmante soirée. Je fais une petite fête dimanche prochain et je vous écris pour vous demander s’il vous serait possible de venir dîner. Cela me ferait très plaisir. Martin le facteur. » (p. 34)

Que voilà un bel album sur la peur de l’étranger et la tolérance ! Moi qui adore écrire et recevoir du courrier, j’ai été conquise par ce lapin qui fait un des plus beaux métiers du monde : porter des lettres (pas des factures, hein !) aux gens, c’est plus qu’un service public, c’est un pont entre les êtres. De manière très classique, cet album alterne page de texte et page illustrée. J’ai trouvé les dessins un peu sombres, voire effrayants quand il est question de la sorcière, mais en relisant l’histoire à la lumière de sa conclusion, il se dégage plutôt des images une nostalgie tendre et douce. C’est une jolie histoire au message d’espoir.

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Les ruses du lièvre

Conte de Françoise Richard. Illustrations d’Anne Buguet.

Le lièvre a un champ de mil qu’il faudrait cultiver, mais il n’a pas du tout envie de le faire lui-même. En promettant la moitié de sa récolte, il réussit à convaincre l’éléphant et l’hippopotame de travailler avec lui, l’un le matin et l’autre la nuit. « Le premier jour, l’hippopotame travaille dans le champ de mil, pour le lièvre. Il travaille dur, et le soir, il s’en va. La nuit à peine tombée, l’éléphant arrive à son tour dans le grand champ de mil. Il travaille dur, jusqu’au matin. » (p. 12)

Une fois que le champ est labouré et que le mil est sorti de terre, le lièvre cherche une autre ruse pour garder toute la récolte. Mais l’hippopotame et l’éléphant comprennent qu’ils ont été dupés et cherchent à se venger. Aie aie aie, comment le lièvre se sortira-t-il de cette situation épineuse ?

Voici un conte qui n’est pas du tout moral ! Comme le Jojo Lapin créé par Enid Blyton ou le médiéval Renart, ce lièvre issu de la mythologie africaine est rusé et roublard. Ne vous fiez pas à sa petite taille : l’animal a plus de jugeote que les deux plus gros animaux de la savane, alors pourquoi n’en profiterait-il pas ?

Les dessins sont superbes : d’inspiration africaine, il vibre des couleurs chaudes de cette terre abreuvée de soleil. Chaque image est encadrée et a des airs de cartouche, voire d’icône. Les ruses du lièvre est un très bel album pour initier les enfants à l’imaginaire africain et pour rire aux dépens des gros balourds.

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Billevesée du dimanche #73

Je suis incapable de manger un yaourt non aromatisé : le petit goût aigrelet me déplaît fortement. Heureusement, il existe le sucre, la confiture ou encore le sirop d’érable. Depuis quelques temps, ma dernière tocade, c’est la vergeoise, emblématique des pâtisseries du Nord et de la Belgique.

Ce sucre est issu de l’affinage du sirop de betterave. Selon le nombre de cuissons, la vergeoise est blonde ou brune. Avec sa saveur caramélisée, elle a conquis mes papilles. Incomparable sur des gaufres ou des crêpes, elle fait aussi un malheur sur les fraises !

Alors, billevesée ?

C’est malin, j’ai envie d’une tarte au sucre maintenant…

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Jours de colère

Roman de Sylvie Germain.

Dans les forêts du Morvan, le hameau du Leu-aux-Chênes est le théâtre de nombreuses folies. Ambroise Mauperthuis est fou d’amour pour Catherine Courvol, qu’il n’a vue et possédée que morte. Edmée Verselay est folle de dévotion mariale et folle d’amour pour sa fille, la monumentale Reine. La folie de Mauperthuis se double d’une colère sourde quand son aîné, Ephraïm, refuse d’épouser la fille Courvol et lui préfère Reine, avec qui il aura neuf fils. C’est au cadet des Mauperthuis d’achever le dessein paternel. De son union avec Claude Courvol, il aura une fille, Camille, qui est le portrait craché de Catherine, son aïeule. Ambroise Mauperthuis reporte sur cette enfant la passion qu’il a eu pour la morte, mais sa nature rageuse lui coûtera le précieux objet de sa folie.

Sylvie Germain s’y connaît pour dépeindre des familles fabuleuses. Son premier roman, Le livre des nuits, était une merveille. Ici, l’arbre familial se fonde sur un père despotique qui, sous le coup d’une colère aux accents d’évènement fondateur, chasse un fils qui repeuplera la terre. Mais entre le père originel et la descendance, il n’y a rien. « Les fils d’Ephraïm n’avaient en commun avec lui que leur nom. Il avait tranché trop violemment tout lien de parenté avec eux avant leur naissance pour qu’ils puissent le considérer comme leur aïeul. » (p. 93 & 94) Et à la folie courroucée d’Ambroise s’oppose le culte de la Vierge, mère adorée et toute puissance qui comble de sa douceur les êtres repoussés.

Le jour de colère, dans le culte catholique, c’est le Dies irae qui ouvre la liturgie des défunts. Du haut de sa folie, Ambroise Mauperthuis n’est pas un dieu miséricordieux et il entend que son courroux soit retentissant, à tel point que le sentiment qu’il porte à son adorée petite-fille ressemble surtout à un anathème d’amour : c’est l’amour d’Ambroise qui maudit Camille. « Lui, qui depuis toujours et à jamais revendiquait le droit exclusif d’amour autour de Camille, – lui qui se considérait comme le destin de Camille. » (p. 242)

Ce qui frappe également dans le texte de Sylvie Germain, c’est la propension des êtres à s’affubler ou à se faire affubler de surnoms qui prolongent leur identité et qui les ancrent dans le réel en accentuant leurs singularités. On flirte avec le merveilleux, mais ce roman n’entre pas dans le genre du réaliste magique même s’il a beaucoup du conte et de la légende. Une légende sombre et noire comme les profondes forêts du Morvan et qui raconte la malédiction née d’un bien mal acquis.

La langue de Sylvie Germain est riche et ciselée comme un joyau, superbe sans être jamais ostentatoire. Les phrases se déploient comme les ailes d’un papillon fantastiquement chatoyant et nous racontent des amours monstrueuses à force d’emportement et d’exclusivité. Il est question de beauté rude et de folie sublime. Sylvie Germain est une reine de l’oxymore et des unions contradictoires. Le plaisir de lire un roman de cette auteure est intense et durable.

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Fuck America

Roman d’Edgar Hilsenrath.

Jakob Bronsky est un juif allemand, rescapé des ghettos, arrivé en Amérique au début des années 1950. Sans le sou, il vit de petits boulots et de combines plus ou moins légales. Au milieu des prostituées et des clochards des bas quartiers de New York, il ne pense qu’à écrire son roman sur son expérience de la guerre. « Quelque part dans mes souvenirs, il y a un trou. Un grand trou noir. Et c’est par l’écriture que j’essaie de le combler. » (p. 63) Outre sa plume, son sexe l’obsède et on le suit dans ses déambulations noctambules à la recherche d’une femme complaisante. « Mon besoin de sexe est directement lié à ma puissance créatrice, à la foi en mon génie artistique. » (p. 99)

Le roman s’ouvre sur la correspondance entre Nathan Bronsky, le père de Jakob, et le consul général des États-Unis d’Amérique en 1938. En quelques lettres très protocolaires, mais particulièrement grossières, on fait comprendre au père de famille juif qu’il n’y aura de la place aux USA pour lui et les siens qu’en 1953 et que, après tout, on se moque bien de ses problèmes avec les nazis. Amérique, terre d’accueil ? Mon cul, oui ! « À l’époque où nous avions besoin de l’Amérique, les portes étaient fermées. Aujourd’hui, nous n’avons plus besoin d’elle. » (p. 33) Pour Jakob, finalement accueilli légalement outre-Atlantique, le ressentiment est un mode de pensée. Il n’y a pas de rêve américain pour les juifs émigrés et l’Holocauste est loin de leur avoir ouvert toutes les portes et attiré toutes les sympathies. « J’ai compris qu’il ne suffit pas de survivre. Survivre ce n’est pas assez. » (p. 271) Encore et toujours, on attend des juifs qu’ils gagnent leur place au soleil, plus durement que les autres.

Jakob est un sympathique baratineur et un charmant looser dont il est diablement agréable de suivre les errances malchanceuses dans la Grosse Pomme. Très solitaire, l’homme s’admoneste régulièrement et entretient des discussions imaginaires avec des personnalités réelles ou inventées. Du fond de sa misère, il rêve à sa réussite en tant qu’homme de lettres et bête de sexe. Les dialogues sont percutants, du tac au tac, avec un aspect profondément théâtral. J’ai particulièrement apprécié l’originalité de la typographie, notamment l’emploi du haut de casse qui rythme le texte de phrases plus puissantes.

Largement autobiographique, ce roman est cynique et porte un regard dérangeant et iconoclaste sur la question juive. Comme son titre le laisse supposer, Fuck America est un texte qui ne s’embarrasse pas de pudeur ou de politiquement correct. Foutraque, mais particulièrement bien foutu, le roman se grignote avec un plaisir glouton. N’oubliez pas de lâcher un rot sonore à la fin de votre lecture, vous ferez plaisir à l’auteur !

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Nous étions les Mulvaney

Roman de Joyce Carol Oates.

« Longtemps vous nous avez enviés, puis vous nous avez plaints. » (p. 13) Dans la petite ville de Mont-Ephraim, les Mulvaney sont connus pour être une famille heureuse, dynamique et dont les membres sont profondément soudés. Jusqu’à un soir de février où un bal de la Saint-Valentin se termine mal pour Marianne, la fille de la famille. Le drame reste un moment secret parce que personne ne le remarque et que Marianne ne dit rien. « Dans une famille, le non-dit est ce que l’on guette. Mais le bruit d’une famille consiste à le noyer. « (p. 145)

Marianne était une jeune fille parfaite, la fille idéale : douce, lumineuse, charitable et populaire. Et les Mulvaney semblaient au-dessus de la honte. Après le drame, la famille est mise à l’index. « Allez tous au diable ! Vous n’avez donc pas pitié de nous ! Nous sommes les Mulvaney. » (p. 396) C’en est fini de l’insolent bonheur qui unissait Corinne, Michael Mulvaney et leurs quatre enfants. L’harmonie est brisée et chacun part de son côté, portant un souvenir dont personne n’ose parler, mais qui obsède les esprits et pourrit les relations familiales. « Quels mots peuvent résumer une vie entière, un bonheur aussi brouillon et foisonnant se terminant par une souffrance aussi profonde et aussi prolongée ? » (p. 666) Il faudra des années pour oublier la colère, la honte et les trahisons familiales.

Le récit est porté par Judd, le petit dernier de la famille qui, des décennies après le drame fait la lumière sur les non-dits et les douleurs qui ne cicatrisent pas. « Mais ce document n’est pas une confession. Absolument pas. J’y verrais plutôt un album de famille. » (p. 18) L’histoire de Mulvaney s’étend de 1955 à 1980 et le récit explore l’avant et l’après du drame. Ce roman est comme une photo de famille encadrée dont le verre s’étoile : à mesure que les fissures s’étendent, l’image se morcelle et la famille se décompose. Joyce Carol Oates utilise à plaisir les prétéritions elliptiques et sibyllines qui annoncent, l’air de rien, toutes les conséquences d’une funeste nuit d’hiver.

J’ai été fascinée par la première partie jusqu’à la révélation du malheur qui a frappé Marianne et, par ricochet, toute la famille Mulvaney. La suite m’a beaucoup plu, mais un peu moins tout de même : sur quelques chapitres, on suit les trajectoires particulières des quatre enfants et des parents Mulvaney. J’ai trouvé quelques longueurs vers le deuxième tiers du récit, mais ce roman de Joyce Carol Oates est passionnant, riche en émotions et en réflexions sur la famille, la réputation, les rapports sociaux et la rédemption.

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Billevesée du dimanche #72

Depuis longtemps, j’aime découvrir des gentilés insolites ou tarabiscotés. Tout a commencé quand j’avais une dizaine d’années et que j’ai découvert que les Germanopratins étaient les habitants de Saint-Germain-des-Près. Et j’ai une tendresse particulière pour les Malgaches de Madagascar, les Séquano-Dyonisiens de Seine-Saint-Denis, les Mahorais de Mayotte ou encore les Clodoaldiens de Saint-Cloud.

Ma dernière découverte incrédule est que les habitants de Besançon sont les Bisontins. Sont-ils futés pour autant ? Les deux spécimens que j’ai récemment rencontrés me laissent à penser que c’est le cas, en plus d’être très sympathiques.

Alors, billevesée ?

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Les successions

Roman de Mikaël Hirsch.

Pascal Klein est un marchand d’art cynique, un rien amer de ne pas être devenu peintre, à l’instar de son célèbre père dont c’était le domaine réservé. Ne pouvant créer, il a choisi de vendre les créations des autres et il se positionne surtout sur l’art moderne, très abstrait et fortement conceptuel. « Une fois la beauté considérée comme ringarde, le support avait sombré au profit de son explication. Duchamp, en rejetant la responsabilité esthétique sur le spectateur, avait mené le monde au relativisme absolu qui conduit invariablement au cynisme. On vendait désormais des modes d’emploi. » (p. 35) Pascal considère l’art comme un bien de consommation courante, certes de luxe, mais qui est régi par les règles du marché, de l’offre et de la demande.

À Tokyo, il cherche un tableau intitulé L’Amazone, peint par Chagall, et qui a déterminé la vocation de son père. La toile a disparu pendant la Seconde Guerre mondiale, butin noyé dans la masse des spoliations nazies. Assis dans un restaurant, Pascal attend un mystérieux interlocuteur qui doit lui en apprendre plus sur le tableau. Seul dans cette ville nippone inconnue, il laisse défiler ses souvenirs et ses rêves avortés. Son esprit vagabonde aussi vers Ferdinand de Sastres, un collectionneur du 20° siècle dont les conceptions de l’art étaient plutôt originales.

Ce voyage au bout du monde relève de la quête existentielle et Pascal s’évertue à trouver du sens et des filiations entre toutes choses, notamment entre les différents possesseurs d’une œuvre d’art et de l’influence de cette dernière sur ses détenteurs. « Lorsque Pascal regardait un tableau, il voyait, avant tout, une succession. » (p. 25) La relation tourmentée entre Pascal et son père est à la source de cette quête et de ses questions identitaires. A-t-il réellement gâché sa vie ou en a-t-il fait ce qu’il devait ? « La ressemblance véritable ne consistait donc pas à susciter l’approbation paternelle, mais bien au contraire à provoquer la rupture. » (p. 112) La réponse n’est pas certaine, mais le plus important semble bien de commencer la réflexion.

Ce récit est décousu, mais passionnant et addictif. Chaque fois que l’on retrouve Pascal à Tokyo, c’est comme si l’on sortait la tête de l’eau pour reprendre notre souffle, alors que Pascal lui-même étouffe dans cette ville japonaise dont il ne comprend pas les messages et les images. J’ai particulièrement apprécié la réflexion sur l’image – artistique ou non –, sa véracité, sa transmission, sa dégradation et son rapport au réel. Dans un monde saturé d’images, la communication devient périlleuse, incertaine et sans cesse mouvante.

Les successions est un roman qui interroge, voire qui dérange. Mais il gratte là où ça fait du bien, sur les relations parents/enfants et les héritages qui sont parfois trop lourds à porter, mais aussi trop précieux à abandonner.

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Cujo

Roman de Stephen King.

Dans une petite ville du Maine, l’été de deux familles va tourner au drame quand un brave chien nommé Cujo est contaminé par la rage. Pour des raisons différentes, les couples Camber et Trenton traversent une crise conjugale, sous les yeux de leurs fils respectifs, Brett et Tad. La maladie du chien aura des conséquences dramatiques dans les deux familles.

Je n’en dis pas plus sur l’intrigue, sinon je risque de la déflorer et surtout d’amoindrir l’angoisse des futurs lecteurs. Dans ce roman très bien construit, on assiste à la lente et folle agonie du saint-bernard, spectacle retardé sans cesse par les récits parallèles qui entourent l’intrigue principale.

Moi qui suis une parfaite chochotte et qui regarde les films qui font peur derrière les oreilles de mon lapin en peluche, j’ai passé un moment délicieusement terrifiant avec Cujo. Dès le début, Stephen King s’emploie à installer un climat de malaise en faisant planer le spectre d’un ancien tueur sanguinaire dans les parages. À cela s’ajoutent les terreurs nocturnes du jeune Tad et tout l’imaginaire effrayant des monstres de placard. Vient enfin la chaleur écrasante d’un été continental qui rend les gestes plus lourds et les décisions plus pesantes.

Mais la grande force de ce roman, c’est de faire d’un élément du quotidien un sujet de terreur. Ainsi, sans rien de surnaturel, le gros chien apprécié par tout le voisinage devient une bête assoiffée de sang, rendue folle par la rage. L’épouvante naît de la banalité et repousse toutes les frontières de la normalité et de la sérénité. Et la peur qui surgit est celle des terreurs d’enfance : « Cette peur qui vous tient au ventre et vous fait fouiller l’obscurité à la recherche de ce qui va vous sauter dessus. » (p. 231)

J’ai beaucoup aimé ce roman, mais je vais faire l’impasse sur l’adaptation cinématographique : les oreilles de mon lapin n’y survivraient pas !

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Chouan et espion du roi – récits de la contre-Révolution

Mémoires de Michelot Moulin. Notes de Louis Réoult de Neuville pour l’édition de 1893. Notes de Stéphane Vautier pour l’édition de 2013.

Sous-titre : Les Mémoires de Michelot Moulin : des guerres de Normandie aux Cent-Jours (1793-1815)

Michel Moulin, dit Michelot Moulin, a été un des chefs de l’insurrection royaliste. Roturier, sans grande fortune, il a su mener des hommes et organiser la chouannerie pendant de nombreuses années. Ses mémoires mêlent des scènes de la vie quotidienne, voire domestique, avec des plans de manœuvres quasi militaires et des relevés des pertes humaines au sortir des batailles. Michelot Moulin est donc un chef de guerre au sens strict du terme, viscéralement opposé au nouveau régime politique qui secoue la France et tente de s’imposer. « Je n’avais nullement la volonté de transiger avec ma conscience et mes principes en me liant à la République par un serment que repousseraient également l’honneur et le devoir. » (p. 111)

On célèbre souvent les héros et les martyrs de la Révolution et la chouannerie est parfois présentée comme une vilaine rébellion de Gaulois résistant encore et toujours à l’envahisseur. L’intérêt de ces mémoires est de présenter la résistance royaliste comme un mouvement d’hommes qui s’opposent entre autres choses à la barbarie des prétendus libérateurs. Pour les chouans, la monarchie n’était pas une tyrannie et leur attachement au roi était sincère.

Michelot Marin fait montre d’une plume agile, précise et facile à suivre. Les notes de Stéphane Vautier répondent et reprennent avec intelligence celles de la première édition. Hélas, je n’ai pas réussi à venir à bout de cet ouvrage et j’ai abandonné page 203 sur 382, après de nombreuses tentatives de reprise. Tout simplement, je me suis perdue dans l’abondance de noms, de lieux et d’évènements et j’ai fini par me désintéresser de ce récit personnel et militaire. Je sors de cette lecture inachevée avec l’envie de lire enfin Les chouans d’Honoré de Balzac. Tout n’est pas perdu, depuis le temps que ce roman attend sur mes étagères !

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Notre-Dame-des-Fleurs

Roman de Jean Genet.

La dédicace liminaire s’adresse à Maurice Pilorge, cet assassin de vingt ans que l’auteur pleurait déjà dans Le condamné à mort.

Du fond de sa prison, Jean rêve à des « amants enchanteurs » et il convoque des hommes de papier pour combler sa solitude et son désir. Pour lui, le crime est beau et il exalte la beauté des criminels. « Je veux chanter l’assassinat puisque j’aime les assassins. […] Je l’ai dit plus haut. Plutôt qu’un vieux, tuer un beau garçon blond, afin qu’unis par le lien verbal qui joint l’assassin à l’assassinat (l’un l’étant grâce à l’autre), je sois, aux jours et nuits d’une mélancolie désespérée, visité par un gracieux fantôme dont je serais le château hanté. » (p. 107) La prison, pour Jean Genet, est une obsession : il l’a souvent pratiquée et il s’y sent chez lui. « Ma bonne, ma tendre amie, ma cellule ! Réduit de moi seul, je t’aime tant ! » (p. 121) Étrangement, il ne semble pas prisonnier et s’échappe de la geôle à force de fantasmes et d’imagination. Avec des coupures de journaux, entre réel et imaginaire, Jean recompose un univers.

Il est question d’un monde noctambule et voyou peuplé d’individus hauts en couleurs. Divine est un travesti renommé dans les bas-fonds parisiens, dingue d’un mac nommé Mignon-les-Petits-Pieds. L’étoile fulgurante de ce milieu canaille et brutal, c’est Notre-Dame-des-Fleurs, un jeune voleur éclatant de beauté, amant occasionnel de Divine et de Seck, un bel Africain. Sous la plume de Jean, on suit les liaisons souvent orageuses des tantes, des tapettes et autres pédales parisiennes.

Le narrateur, c’est Jean, très probablement Jean Genet, qui livre ses troubles et ses peines. « Ce livre, j’ai voulu le faire des éléments transposés, sublimés, de ma vie de condamné, je crains qu’il ne dise rien de mes hantises. » (p. 204) On retrouve dans ce roman les thèmes évoqués dans Le condamné à mort : « Mes livres seront-ils jamais autre chose qu’un prétexte à montrer un soldat vêtu d’azur, un ange et un nègre fraternel jouant aux dés ou aux osselets dans une prison sombre ou claire ? » (p. 24) Dans sa langue si unique, qui mêle argot et poésie, Jean Genet chante une nouvelle fois les amours homosexuelles, ainsi que son obsession pour la beauté et la jeunesse masculines. C’est une littérature très particulière et un sujet qui peut en gêner, voire en choquer certains. Je ne prends pas position et je me contente d’apprécier, sans toujours la comprendre, la poésie foudroyante de Jean Genet, auteur passionné et torturé.

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Billevesée du dimanche #71

L’été viendra ou ne viendra pas, on ne sait pas vraiment cette année. Mais qui dit été, dit transpiration. (Oui, je fais dans le glamour aujourd’hui…)

Si vous voulez connaître tous les aspects de la transpiration chez l’humain, je vous invite à prendre le RER en fin de journée… Mais intéressons-nous plutôt aux animaux ! Les chats transpirent uniquement par les coussinets (mais ils ne puent pas des pattes, les veinards !) et les chiens transpirent par la langue (et ils ont tendance à puer du bec…). Voilà pour la touche poilue du jour !

Alors, billevesée ?

(Cette photo n’est pas libre de droit)

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Peau de lapin

Bande dessinée de Gauthier.

C’est l’histoire d’un garçon-lapin qui craint la fin de journée. « Le temps de la peur… à 19 h 00 pile. « Quand mon père rentrait du travail, j’étais le lapin et lui le chasseur, me cachant dans la forêt qu’était devenue la maison. » La brutalité et la cruauté du père marquent l’enfant et le poursuivent longtemps, même quand il part s’installer très loin avec sa mère.

Hélas, ailleurs, il y a d’autres violences et d’autres douleurs. La cour de récréation et l’école sont le foyer d’une cruauté qui n’en finit pas, à tel point que l’enfant-lapin fait des souhaits macabres. « J’aimerais pouvoir disparaître. » Seul, sans ami, le garçon ne peut que fuir et se soustraire à ce qu’on attend de lui, mais comment se justifier ? « Je viens d’avoir ton professeur, il paraît que tu ne vas plus en classe depuis 5 jours… Mais pourquoi tu me fais ça !! / C’est parce que je suis une crotte de lapin. » Alors, très vite, c’est l’escalade : l’estime de soi et la confiance disparaissent, laissant place à une violence déviante, aux portes de la folie.

Peau de lapin se présente sous la forme d’un album carré, épais et doux. Le dessin au crayon de bois se répartit en quatre cases par page. Ça pourrait être les dessins d’un enfant ou d’un apprenti dessinateur, mais il ne faut pas se fier à l’apparente naïveté du trait. Cette histoire, présentée comme autobiographique, parle de douleur et de solitude. Ou comment un enfant maltraité se défend comme il peut, développant à son tour une cruauté qu’il ne maîtrise pas et qui le sépare toujours plus des autres et du monde. Je ne m’attendais pas à tant de puissance et de violence en ouvrant ce livre.

Régulièrement, il y a des pleines pages où la mine grise du crayon de bois envahit l’espace, réduisant le blanc à force de traits systématiques, réduisant de même l’espoir et la vie. En ne lisant que ces pages uniformément grises, où ne figure qu’une phrase, on retrace toute l’histoire de la dépression chez l’enfant, en passant de la surprise au doute et à l’inquiétude. Cet album n’est pas à mettre entre les mains des enfants. Âmes sensibles, s’abstenir. Donc, une grosse émotion en lisant cet ouvrage qui n’est pas tendre et qui n’offre pas de rédemption. Non, cette histoire ne finit pas bien, mais si ce récit est réellement autobiographique, il y a un espoir. Un bel espoir.

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Swap

Roman d’Antony Moore.

À 12 ans, Harvey propose à Charles, dit Bleeder, d’échanger le comic Superman numéro 1 contre un tuyau de plastique. Mais, des années plus tard, la bande dessinée a gagné en valeur et Harvey a le sentiment que cet échange l’a privé d’une vie riche et heureuse. Il faut dire que sa vie est plutôt minable : gérant d’une boutique de bandes dessinées, il est à la fois un adolescent attardé et un adulte immature. Obsédé par la bande dessinée qu’il a échangée pour rien, il espère revoir Charles lors de la réunion des anciens de l’école. Mais jusqu’où est-il prêt à aller pour retrouver ce numéro rarissime des aventures de Superman ? Et que faire si la tête de Turc de l’école décide de se venger, vingt ans plus tard ?

Ce roman se fonde sur une idée originale : comment un échange de cour de récréation peut-il décider de la trajectoire d’une vie. L’auteur dissèque sans concession l’échec des rêves de gosses et des ambitions d’adultes. Outre les douleurs de l’enfance, Swap explore les secrets que certains auraient aimé garder au fond des caves. « Les secrets, c’est comme l’argent : on ne les dilapide pas, on les met de côté en pensant à l’avenir. » (p. 290)

Mais j’ai eu bien des difficultés à suivre les errements d’Harvey : cet adulte pathétique m’a rappelé le protagoniste de Haute fidélité, roman de Nick Hornby. Harvey est un antihéros qui nage dans un monde de superhéros. Son pouvoir ? Voyez vous-même : « Harvey était doué pour analyser le langage du corps. Par beau temps, il pouvait se vexer à cent mètres de distance. » (p. 289) Le ridicule ne tue pas, c’est vrai, mais il peut finir par ennuyer le lecteur. J’ai terminé à grand-peine cette histoire qui passe de l’aventure potache au roman noir.

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Doña Isabel ou la véridique et très mystérieuse histoire d’une Créole perdue dans la forêt des Amazones

Roman de Christel Mouchard.

Une fois n’est pas coutume, je vous présente la quatrième de couverture au lieu d’un résumé de mon cru, ça m’évitera d’en dire trop…

« Pérou, octobre 1769. Une noble Créole quitte son hacienda avec trente et un porteurs et s’enfonce dans la forêt d’Amazonie pour rejoindre en Guyane son mari, le Français Jean Godin des Odonais, qu’elle n’a pas vu depuis vingt ans. Mais son expédition se perd, disparaît… Les semaines passent. De la cordillère à la côte, on tient les voyageurs pour morts, noyés par les crues, rongés par les fièvres, massacrés par les sauvages ou mangés par les fauves. Quand soudain, dans les méandres de la rivière Bobonaza, près de la mission d’Andoas, une femme sort de la forêt, seule… Doña Isabel. Comment a-t-elle pu survivre ? Pour Jean, seuls l’amour et l’espoir de le revoir ont permis à sa belle épouse de triompher de l’horreur.

Très loin de là, dans un salon parisien, un savant réputé, homme des Lumières et grand voyageur, Charles de la Condamine, entend parler de cette émouvante aventure. Il n’est pas dupe car il a bien connu Isabel et Jean… Pour découvrir ce qui se cache sous les apparences, il va entreprendre un dernier voyage, une dernière enquête. »

Le narrateur est donc le vieux Charles de la Condamine. Il a rejoint le couple des Odonais dans leur demeure du Berry. « Jean et Isabel ne m’attendaient pas. Ils se cachaient. Ils ne me croyaient pas capable, infirme comme je l’étais, de traverser la France pour leur demander compte de l’invraisemblable récit qu’ils m’avaient servi. » (p. 18) Au cours d’une longue après-midi et d’une interminable nuit, il questionne son hôte sur le naufrage de son épouse, cherche à démêler le vrai du faux et s’étonne de ce qu’Isabel refuse de se montrer. « Monsieur, je ne cache pas mon épouse. C’est elle qui se cache. » (p. 130)

Au récit de la périlleuse aventure d’Isabel se mêlent les souvenirs de l’expédition française de 1736 à laquelle Charles et Jean ont participé. Mandatée par le roi de France, une équipe de savants avait pour mission de mesurer un degré de méridien au Pérou. Par manque de chance et de moyens, l’expédition a duré 7 ans, période au cours de laquelle Charles a eu tout le temps de faire la connaissance de la très jeune épouse de Jean. Simple porteur de chaînes, c’est un miracle qu’il ait réussi à se faire épouser par cette riche héritière, mais auréolé de la gloire d’être français, il était un parti tout à fait enviable. Reste à savoir si cette ancienne expédition a un lien avec le malheureux voyage d’Isabel.

Ce roman se fonde sur un fait réel : en annexe de son récit de voyage, Charles de la Condamine a effectivement joint cette histoire étrange. Ici, Christel Mouchard s’empare des incohérences du récit originel pour tenter de percer le secret de cette désastreuse équipée jonchée de morts, entre querelles familiales, faillite et affaire de mœurs. A-t-elle réussi à percer les mystères du Pérou ou resteront-ils captifs et protégés de l’épaisseur de la forêt amazonienne ? À vous d’en juger ! Pour ma part, j’ai passé un très bon moment de lecture, en dépit de quelques digressions un peu longues.

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Un tramway nommé désir

Pièce de théâtre de Tennessee Williams.

Nouvelle-Orléans, quartier français. Un soir, Blanche Dubois arrive chez sa sœur, Stella, et son beau-frère, Stanley Kowalsky. La jeune femme ne peut se résoudre à la pauvreté du couple et ne cesse de rappeler la richesse qu’elle a connue. Blanche est une femme très sensible, tout en nerfs. « Il faut que je sois avec quelqu’un, je ne peux pas rester seule… parce que comme tu t’en es aperçue, je ne vais pas très bien. » (p. 30) Immédiatement, Stanley prend sa belle-sœur en grippe : il ne succombe pas à ses manières et ne supporte pas ses prétentions aristocratiques. « De la féérie ! C’est ce que je cherche à donner aux autres ! Je veux enjoliver les choses. Je ne dis pas la vérité, je dis ce que devrait être la vérité ! Que je sois damnée si c’est un péché ! » (p. 180) Et surtout, Stanley ne croit pas à son histoire. Il se renseigne et finit par découvrir le honteux secret de Blanche, qui n’est blanche que de nom.

Stanley est clairement une brute sans raffinement et tout dans sa nature s’oppose à la fragilité nerveuse et inquiète de Blanche. La rencontre entre un esprit malade et un esprit brutal ne peut qu’être âpre et violente. Blanche ne supporte pas les attaques et les contrariétés et Stanley ne supporte pas les méandres tortueux du comportement de sa belle-sœur. Tout les oppose, indéniablement, mais la tension sensuelle est palpable, voire épaisse. Blanche a beau crier son dégoût pour la brute que sa sœur a épousé, Stanley a beau se moquer des chichis de sa belle-sœur, quelque chose ne peut que s’enflammer entre eux, qu’ils le veuillent ou non.

Une fois n’est pas coutume, j’ai découvert le livre grâce au film. Marlon Brando beuglant sa rage et hurlant le nom de sa femme, ça m’a fait un petit quelque chose la première fois que je l’ai entendu ! Et l’acteur sait parfaitement magnifier un t-shirt blanc… La pièce de Tennessee Williams est superbe, mais les didascalies ont fini par m’épuiser. L’auteur a une idée très claire de son texte et de la mise en scène qu’il veut. Mais l’abondance d’indications scéniques m’a lassée puisque les dialogues y sont presque noyés. Ici se pose donc une question récurrente quand on parle de théâtre : un texte théâtral est-il fait pour être lu ou pour être vu ? Je me garde bien d’y répondre et ne peux que vous inviter à lire le texte et à voir le film de 1951.

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Natures mortes au Vatican – Roman noir et gastronomique en Italie à la Renaissance

Roman de Michèle Barrière.

1570, Rome. François Savoisy est le secrétaire particulier de Bartolomeo Scappi, cuisinier du pape. François aide son maître à rédiger son Opera, le grand livre de recettes qui couronne sa carrière culinaire. « Maître, vous êtes le plus grand cuisinier de tous les temps et je suis fier de participer à votre œuvre. Ces recettes, j’en suis persuadé, feront autorité dans l’Europe entière, peut-être aux Amériques, et pourquoi pas en Chine. » (p. 145) Quelques amis demandent à François d’organiser un souper en l’honneur de Vénus pour célébrer la visite du peintre Arcimboldo dans la ville éternelle. Mais la soirée vire à l’orgie et au massacre et Arcimboldo disparaît. Tout cela aurait-il un lien avec le cardinal de Granvelle qui semble bien intéressé par le livre de recettes de Scappi ?

Ce roman noir et culinaire se lit très vite et très bien, mais je ne peux pas dire qu’il m’ait vraiment intéressée. Dans un premier temps, j’ai apprécié les recettes égrenées au fil des pages, mais le tout à fini par tourner à l’indigestion. Quant la peinture : j’ai retrouvé avec plaisir certains tableaux d’Arcimboldo, mais il m’a semblé que l’art pictural n’est évoqué que de façon anecdotique, même si la nature morte gastronomique est présentée comme le renouveau de la peinture au 16° siècle.

D’un point de vue historique, ce roman est toutefois très intéressant : l’auteure détaille la terrible opposition entre la Rome des Césars et Rome des papes, la seconde pillant la première pour affirmer et étaler sa grandeur et sa puissance. La cité éternelle se renouvelle et les nouveaux bâtiments sont construits avec les pierres des monuments antiques qui s’écroulent et menacent ruine. La religion n’est pas en reste puisque l’intrigue se déroule au milieu des cardinaux et autres prélats et que François finit par rencontrer des calvinistes.

Je ne garderai pas un profond souvenir de ce roman, mais ce fut une lecture plaisante.

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Billevesée du dimanche #70

Vous le savez, le lapin est mon totem. Un digne représentant de cette adorable espèce animale, c’est Panpan, le meilleur ami de Bambi.

L’info du jour, c’est le nom original du lapin : en anglais, il s’appelle Thumper et ça renvoie évidemment au bruit qu’il fait quand il tape avec sa patte arrière. Un des moments que je préfère dans ce dessin animé !

Alors, billevesée ?

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Étoiles

Nouvelle de Simonetta Greggio.

Gaspard est l’étoile montante de la gastronomie française. Il est marié à une femme superbe et il a un associé très impliqué. Et puis, un soir, son petit monde parfait s’écroule. Alors, Gaspard s’en va et roule pendant des kilomètres. « Quand on vous fait très mal, la seule revanche qui reste est celle de vous en faire plus encore. Il était prêt pour toutes les conneries quand il arrêta le 4×4 au bord de la route. Il en descendit sans la fermer à clé, car tout ce qu’on aurait pu lui voler avait déjà été pris. On avait cambriolé son cœur, dévalisé ses chimères, il avait été dépouillé, escroqué. Il était fini. » (p. 33)

Gaspard trouve refuge dans un petit village du sud de la France et s’installe dans une buvette perdue au bout d’un sentier pierreux et perdu. Inconnu, anonyme, il reprend goût à la vie et cuisine à nouveau avec plaisir. Et surgit Stella Amor, une fille si fine que la lumière lui passe à travers. Avec amour, Gaspard va lui rendre le goût de manger.

Voici une courte nouvelle qui se lit très bien et propose une histoire plutôt mignonne sur l’anorexie et les miracles de l’amour. « Depuis qu’elle vivait près de Gaspard, elle comprenait que manger n’est pas se tuer à petit feu, mais entretenir son petit feu. » (p. 66) Le mot à retenir, c’est mignonne… Stella Amor, vraiment ? C’est le nom de personnage le plus ridiculement guimauve que j’ai jamais lu ! Et que dire que la romance entre l’homme, force de la nature au cœur blessé, et la femme, fragile et meurtrie, qui reprend vie dans les bras de son Jules ? À 15 ans, cette histoire m’aurait enchantée. À mon âge presque canonique, elle m’a simplement fait sourire, parfois un peu méchamment.

Sur la forme, je déplore un style inégal : la plume est majoritairement très fine, mais plonge parfois dans le potache. Dommage également que des règles de grammaire de base n’aient pas été respectées. Dernier mauvais point pour la couverture : l’illustration ne correspond pas au roman et quid du carnet de recettes annoncé en quatrième de couverture ? Probablement un oubli avec le passage au format poche. Bref, une lecture plaisante, mais que j’oublierai très vite.

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Impurs

Roman de David Vann.

1985, dans la Vallée centrale de Californie : à 22 ans, Galen vit encore chez sa mère. Au motif de difficultés financières, celle-ci a toujours refusé de lui payer l’université. Pour Galen, cela signifie surtout que sa mère refuse de le voir partir. « Elle avait fait de lui une sorte d’époux, lui, son fils. Elle avait chassé sa propre mère, sa sœur et sa nièce, et il ne restait plus qu’eux deux, et chaque jour il avait le sentiment qu’il ne pourrait supporter un jour de plus, mais chaque jour il restait. » (p. 12) Leurs journées sont rythmées par les thés sous les arbres et les visites à la maison de retraite où est internée la grand-mère de Galen.

Galen voudrait être un nouveau prophète bouddhiste. Il se sent comme une vieille âme et il rêve de détachement et d’illumination. Mais comment y parvenir avec sa mère qui se rappelle sans cesse à lui ? « Sa mère, une perturbation constante, une déchirure dans le tissu de l’espace et du temps. Aucune paix possible quand elle était dans les parages. » (p. 70) Et il y a aussi sa tante Helen, obsédée par l’héritage de la grand-mère et par d’anciennes rancœurs familiales, et sa cousine Jennifer, belle adolescente perverse et cruelle. Un bref séjour dans la cabane familiale va redistribuer les cartes : la tension brûlante explose et tous les non-dits cèdent enfin devant la haine et la colère.

Dès la première page, David Vann installe le malaise. Dès le titre, même. Tous les pantins de cette farce grotesque et brutale sont impurs, chacun à leur manière. Mais ils sont en fait simplement humains. Et il n’y a que Galen pour vouloir dépasser ces attachements vulgaires : pour lui, sexe, nourriture et argent sont autant de perversions obsédantes dont il doit apprendre à se défaire pour accéder enfin à la révélation. Vivant dans un vertige constant, il enchaîne les méditations, jusqu’à ce que ça ne suffise plus à lui offrir le détachement auquel il aspire. « Tout ce qu’il voulait atteindre était juste hors de sa portée, invariablement. » (p. 208) Comme dans les autres romans de David Vann, la fin sera brutale, inévitablement, comme l’annonce la pelle prophétique sur la première de couverture.

Après Sukkwan Island et Désolations où il avait exploré les tourments glacés de l’âme humaine dans des décors froids et désolés, David Vann signe ici une incursion dans la fournaise des haines familiales sous un soleil dévastateur. Cette histoire est haletante : je n’ai pas pu décrocher de ces pages et de cette écriture incisive et mordante. Sans aucune concession, l’auteur peint l’entrée dans la folie d’un jeune homme torturé. Impurs est magistral, sans merci. À lire avec le cœur bien accroché.

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Un instituteur communiste en Algérie – L’engagement et le combat (1936-1965)

Biographie d’Alexis Sempé, sur la base des carnets, de la correspondance, des discours et des photographies de Gaston Revel.

Né en 1915 dans l’Aude, Gaston Revel se destine très tôt à l’enseignement. Pacifiste et sensible aux idées du Front populaire, il développe rapidement une forte conscience politique qu’il exprime notamment dans sa longue correspondance avec Janos Mezei, un ami hongrois, et chaque lettre sonne comme un manifeste lancé d’une tribune anonyme. « Nous pendrons le dernier Croix de feu avec le dernier boyau du dernier des curés. » (p. 34)

L’instituteur fait sa drôle de guerre à Bitche, en Moselle, mais il est envoyé en Algérie en 1940 pour éduquer les « indigènes », comme on les appelle en France. À Aïn-Tabia, il est le témoin révolté de l’oppression coloniale. « Il découvre finalement une Algérie éloignée de celle représentée en 1930 lors du centenaire de la conquête, ou en 1931 dans le cadre de l’Exposition coloniale. » (p. 104) Le fleuron colonial français est pauvre et manque de tout. Très peu d’enfants sont scolarisés et les programmes scolaires ne sont pas adaptés au pays : qu’a donc à faire un enfant de fellah des sous-préfectures françaises ? Ne vaudrait-il pas mieux lui enseigner davantage sur son propre pays. Mais attention, à cette époque, l’Algérie, c’est la France. « Persuadé du rôle émancipateur de l’École républicaine, Gaston Revel espère apporter beaucoup aux petits ‘indigènes’. » (p. 160) En quelque sorte, l’instituteur est une réminiscence des Hussards noirs de la troisième République : il est convaincu de la nécessité du savoir dans la constitution d’esprits éclairés et libres.

À la fin de la guerre, son engagement communiste est officiel. « La guerre terminée, Gaston Revel repart en Algérie avec des idées politiques affirmées. Il semble que sa maturation en ce domaine, après plusieurs expériences, arrive enfin à son terme. Sa difficile mais enrichissante expérience d’Aïn-Taiba l’a certainement poussé à une réflexion sur les méfaits du colonialisme. De plus, même sans preuve, on peut supposer que les deux ans et demi passés sous l’uniforme au contact de ses camarades africains ont pu aussi jouer un rôle non négligeable dans sa prise de conscience anticoloniale. Enfin, l’affrontement face aux puissances de l’Axe l’a persuadé de l’importance de la lutte contre le fascisme. Afin de lutter contre ces deux fléaux, mais aussi dans l’espoir de construire un monde meilleur, il entre au PCA. » (p. 172) Gaston Revel est maintenant instituteur à Bougie, une ville au nord de l’Algérie. Il s’y révèle un maître dévoué à ses élèves et un homme investi dans la vie civile.

Gaston Revel est très apprécié des Algériens et il entre dans leurs cercles. « Il est celui qui semble réaliser le mieux la jonction entre les Européens et les musulmans au sein du Parti communiste, mais aussi dans la population bougiote. Même s’il suscite le respect des musulmans, ce qui l’amène à être élu au conseil municipal en 1953, il veut être aussi le représentant des Européens qu’il n’oublie pas. » (p. 255) Ce natif de l’Aude semble être l’incarnation du parfait colon, si un tel être peut être envisagé sans paradoxe : il tente de concilier deux cultures et deux populations sans reconnaître aucune prééminence des unes sur les autres. Contraint de quitter définitivement l’Algérie en 1965, Gaston Revel ne cesse pas son activité au sein du Parti communiste et même s’il parle peu de son expérience algérienne, il l’évoque parfois dans des lettres parues dans L’Humanité.

Dans ses carnets, Gaston Revel se révèle très minutieux : ces écrits tiennent autant du journal intime et du recueil de pensées que de la chronique de l’histoire en marche. Mais Gaston Revel ne se contente pas d’être un observateur de son époque. Engagé au sein du Parti communiste algérien et de la CGT, il s’est farouchement opposé à la politique coloniale française tout en rejetant les dérives du nationalisme algérien. Dans un sens, il me rappelle Albert Camus qui, à force d’être d’ici et de là-bas, finit par n’être de nulle part, meurtri de n’avoir pas su concilier deux pays d’égale importance à ses yeux.

Le travail de compilation et d’analyse d’Alexis Sempé est impressionnant. Sa biographie de Gaston Revel se déroule avec fluidité, plaisamment rythmée par les extraits de la correspondance de l’instituteur, mais aussi par des photos et de nombreux types de documents, comme des discours, des articles et autres archives. J’ai particulièrement apprécié les photos des gamins si fiers de poser pour Monsieur l’instituteur. Je suis fermement convaincue que l’éducation doit être un des fondements des sociétés – et quand je vois ce que devient cette institution en France, je pleure – : c’est donc avec un intérêt presque militant que j’ai lu cette biographie. À chacun ses opinions politiques et je ne partage pas toutes celles de Gaston Revel, mais son engagement auprès des enfants algériens et du pays dans son ensemble m’a profondément touchée.

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Le Cirque – Journal d’un dompteur de chaises

Roman graphique d’Ileana Surducan.

Manu est un petit homme chauve qui est convaincu que les chaises ont une âme et des rêves. Alors, la journée, il travaille à l’usine, mais la nuit, il est dompteur de chaises dans un Cirque qui se produit à l’extérieur de la Cité, là où il est interdit de se rendre. « Inciter les gens à sortir de la Cité la nuit et promouvoir des distractions illégales est interdit. Article 23/5 du règlement. » (p. 11) dans la ville, ils sont peu nombreux à croire à l’existence réelle du Cirque : « Il n’y a que des débris en dehors de la Cité. » (p. 11) Et pourtant, toutes les nuits, Yannick le magicien, Mia la jongleuse de feu, Pierrot l’acrobate et Manu le dompteur de chaises enchantent les petits et les grands autour d’une piste aux étoiles enchanteresse. Mais alors, si le Cirque est illégal, comment y viennent les spectateurs sans se faire prendre par les automates qui gardent la Cité ?

Voilà qu’une étrange menace plane sur la Cité : des bestioles grignotent les mécanismes des machines. Qu’à cela ne tienne ! Puisque ces bêtes ont peur du noir, il n’y aura plus jamais de nuit, ni d’obscurité. Plus personne ne dormira et la lumière de la raison et du savoir rationnel ne cessera jamais de briller. Hélas, s’il n’y a plus de nuit, il n’y a plus de sommeil, ni de rêves, ce qui ne fait pas du tout les affaires du Cirque. « Les rêves des gens, c’est la lumière qui nous permet d’exister. » (p. 71)

Ileana Surducan offre une superbe variation sur le thème des dictatures scientifiques. La Cité automatisée s’oppose au Cirque qui est le monde du rêve et du tout-possible. Voir des chaises faire des pirouettes, c’est impossible ? Non, pas au Cirque. Avec ses sièges apprivoisés, Manu montre qu’il est possible de réapprendre à rêver et de combattre ses peurs. Dans son journal, les jours se suivent toujours plus beaux et plus magiques. J’ai beaucoup apprécié l’humour tendre de cette histoire. « Dis donc, tu sors des trucs d’un chapeau vide ? / Non. Je sors des trucs d’un chapeau plein. » (p. 51) Le Cirque rassemble une bande de joyeux loufoques et de doux dingues en habit de lumière que l’on voudrait suivre au bout du monde, pour ne pas manquer un instant du spectacle. Il y a assez peu de textes dans ce roman graphique, mais l’image est si éloquente qu’on se passe bien de mots. Quel plaisir d’en prendre plein les yeux à chaque page ! Comme dans toute BD classique, il y a des cases plus ou moins carrées, certaines plus longues ou larges que d’autres. Il y a aussi de sublimes pleines pages qui explosent de couleurs et de mouvements. Et il y a quelques images découpées dans lesquelles le personnage est son propre espace et délimite les propres contours de son geste.

Entre aquarelle, fusain et sanguine, Ileana Surducan a créé un Cirque inoubliable qui rappelle qu’il ne faut jamais oublier de rêver. La lecture de son ouvrage a été comme un rêve éveillé : j’ai été émerveillée à chaque page par la finesse des traits et l’éclat des couleurs. Petits et grands, n’hésitez pas à prendre un billet pour le Cirque d’Ileana Surducan, vous ne le regretterez pas !

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Billevesée du dimanche #69

Il était une fois, je vous parlais de péché mignon. Maintenant, il est temps de tout vous avouer. À choisir entre une pâte à tartiner ultra célèbre et une autre douceur, je préfère (à m’en damner [je file la métaphore du péché, vous voyez…]) la confiture de lait. On la connaît aussi sous le nom de dulce de leche.

Cette gourmandise est très appréciée des pays d’Amérique du Sud, mais on en consomme aussi beaucoup en Normandie et en Savoie. Sa création est entourée d’un certain mystère puisque les explications abondent. Pour certains, il s’agit d’une antique façon de conserver les excédents de lait. Pour d’autres, c’est une erreur que l’on doit à un cuisinier de l’armée napoléonienne qui aurait oublié sur le feu une casserole de lait sucré. Mais il y a des productions avérées de confiture de lait sur le continent sud-américain bien avant que le (petit) Corse ne se décide à envahir la Russie.

Moi, je me moque bien de savoir d’où elle vient du moment qu’elle arrive tous les matins sur mes tartines !

Alors, billevesée ?

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