Charles Baudelaire était un enfant insolent et affolé d’amour pour sa mère. Il a évidemment mal supporté le remariage de cette dernière avec un militaire ambitieux et brusque. Très vite, le jeune homme s’imbibe des drogues les plus diverses et fréquente les pires prostituées de Paris. « Je sens maintenant en moi une préférence pour les femmes viles, sales, monstrueuses, que ce sont elles qui m’inspireront. J’aime les idées choquantes, le reste m’ennuie. » Ne lui parlez pas d’Hugo : il n’a que faire d’égaler le maître des lettres françaises. Lui veut fouiller l’immonde et le crasseux pour faire sa poésie. Toujours plus saturé d’alcool, de haschich et d’opium, Baudelaire refuse la réalité médiocre. « Ça me métamorphose en poète augmenté qui saura pétrir de la boue pour en faire de l’or. » Sa relation tempétueuse avec Jeanne Duval, la pression de ses créanciers, ses liens malsains avec sa mère ou encore les lents et impitoyables ravages de la syphilis, tout cela compose l’identité du poète qui révolutionne le monde littéraire. « Il m’est agréable que ma vie et mon œuvre soient déplaisantes aux bourgeois français. »
Le roman est ponctué des poèmes de Baudelaire et de fac-similés de documents écrits de sa main. Après avoir écrit sur François Villon, Arthur Rimbaud et Paul Verlaine, Jean Teulé ne pouvait pas ne pas consacrer un ouvrage à ce poète, maudit parmi les maudits. La plume de l’auteur est toujours plaisante à lire, enlevée et impertinente. Toutefois, même si je sais que les sources sont maigres, je déplore le portrait que Teulé fait de Jeanne Duval. J’ai préféré celui d’Yslaire dans son roman graphique, Mademoiselle Baudelaire.