
Roman de Jean-Paul Dubois.
« J’ai quarante-cinq ans et je ressens cette pénible impression de n’avoir aucune prise sur la vie. J’ai fait fausse route, je me suis trompé quelque part. » (p. 12) Samuel Polaris est paumé, largué, en quête de sens. Sa femme le trompe avec un collègue et il méprise ses enfants. Auteur de petite renommée, il vit quelque peu reclus et oisif après une crise de nerfs sur un plateau télé. Décidant de secouer son désespoir mou, il achète un revolver et se met en tête d’obtenir la montre de son psy, ancienne possession du président Kennedy.
Voilà une énième histoire d’homme mûr désabusé et revenu de tout. Oui, il est dépressif, mais il pourrait tout aussi bien collectionner les petites voitures, car sa dépression est moins une maladie qu’une façon d’occuper le temps. Samuel Polaris est une caricature de quadragénaire autocentré mal dans sa peau qui ne fait rien pour aller vraiment mieux. Là où il est véritablement odieux – et non, je n’y vois aucun cynisme ou humour noir –, c’est qu’il reporte sur son entourage son mal-être et ses frustrations. Il ne m’a inspiré aucune empathie, aucune sympathie. Quand une rage de dents mal traitée déforme son visage, elle donne à voir la laideur intérieure et putride d’un pauvre mec qui ne sait plus comment se faire remarquer. Depuis le De Esseintes de Joris-Karl Huysmans, je doute qu’on ait vraiment réussi à écrire le taedium vitae et je suis lasse des gesticulations larmoyantes des mâles médiocres et faussement extravagants en mal d’attention.
Ce roman a cependant un mérite, c’est d’être un plaidoyer – probablement involontaire – pour la santé mentale des hommes. Messieurs, vous avez le droit d’aller mal, d’être désemparés, de souffrir tout simplement. Mais voilà, ça ne guérit pas tout seul ! « Être débarrassé du souci et du regard de l’autre. Ne plus avoir à se surveiller. Ignorer la culpabilité. Régner sur sa décrépitude. Pouvoir se détruire sans témoin. » (p. 101) Vous ne marcheriez pas sur une jambe cassée sans un plâtre et des béquilles ? Alors, arrêtez d’avancer dans le monde avec une psyché douloureuse ! Allez consulter, demandez de l’aide ! Le mutisme et la lente glissade vers l’aigreur n’ont rien de viril et ils ne sont pas la solution.
Pour revenir un peu au roman, les chapitres alternent entre Samuel qui parle à la première personne et son épouse Anna qui fait l’objet d’une narration à la troisième personne. Lui est donc sujet et acteur, elle n’est qu’observée. Polaris est finalement un poseur cruel et indifférent, odieux et égoïste, geignard, lâche et paresseux. Alors que la quatrième de couverture annonce de l’érotisme, les scènes de sexe ne sont que vulgaires et essentialistes. Bref, ce roman nombriliste tourne en rond, littéralement, comme le prouve la dernière phrase. Il m’a rappelé, en largement moins bon, Mon chien stupide de John Fante.
En voici un qui n’augmentera pas ma PAL ! 😄
Je ne te le conseille pas du tout !
🤣