Bande dessinée d’Hubert et Gaëlle Hersent.
Dans la ville reculée de Solidor, Illian est l’apprenti de maître Koppel. Dans l’atelier de ce dernier, il travaille sans cesse pour produire des cages ouvragées et finement ciselées qui accueilleront les oiseaux qui font la renommée de la cité. Le jeune homme est un sculpteur talentueux, exploité par son employeur et impatient de gagner enfin son indépendance. Mais plus que tout, il aime les oiseaux. « Illian désirait tellement avoir un oiseau à lui qu’il se serait contenté d’une griselotte malgré son chant disgracieux. » (p. 12) Quand, par hasard, un de ses oiseaux sculptés attire l’attention de la bonne société, Illian ne se doute pas que son talent va profondément modifier Solidor et attrister son propre cœur. « Il désirait passer le reste de ses jours précisément là, au milieu des fleurs, des arbres et des chants d’oiseaux, de ces oiseaux que son art avait involontairement libérés de leurs cages. » (p. 92) L’artiste apprend douloureusement que la nature peut être plus belle que l’art.
Dans le premier volume de cette bande dessinée très poétique, aux airs de conte philosophique, les auteur·ices rappellent que la nature est la première forme d’art et fustigent la course effrénée à la consommation et à la possession, souvent motivées par des modes éphémères. À suivre le chemin d’Illian, le lecteur, à son tour, se demande s’il existe un sens à emprisonner ce que l’on aime. « Un oiseau en cage, ça ne vit pas très vieux. » (p. 76)
L’ouvrage est superbe, dès sa couverture magnifiquement dessinée et bosselée. Mention spéciale pour l’expressivité des visages et la délicate façon dont les chants d’oiseaux sont matérialisés dans l’image, comme la traînée subtile et envoûtante d’un parfum. Je vais sans attendre lire le deuxième tome de cette histoire.