La cathédrale de la mer

Roman d’Ildefonso Falcones.

Libre après le combat qu’a mené son père pour les délivrer de leur servage, Arnau grandit à Barcelone auprès de la Vierge de la mer. D’abord porteur de pierres pour la cathédrale Santa Maria del Mar, Arnau devient le héros de tout un peuple. Tour à tour cambiste puis consul de la cité catalane, Arnau affronte la Grande Peste, la persécution des Juifs et l’Inquisition. Il est toujours en tête des combats en faveur des pauvres et des opprimés.

Belle fresque historique qui progresse à mesure que s’élève les murs de la cathédrale Santa Maria. L’auteur nous fait traverser l’histoire de Barcelone avec passion et aventure. C’est un bon roman, captivant et divertissant, un peu de la trempe des romans de Dumas ou de Zévaco, tout en batailles et passions amoureuses.

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L’angoisse du morpion avant le coït

Texte d’Antonio Fischetti.

Questions incongrues, grands mystères de la sexualité… Tout est là, et surtout le pire…

J’avoue, ce n’est pas la lecture la plus glorieuse de ces derniers jours… Mais qu’est-ce que j’ai ri ! Ce livre valait bien un article pour tous les bienfaits qu’il m’a apportés : des zygomatiques remusclés, des abdominaux renforcés, de l’endorphine plein mes cellules et quelques petits trucs pour devenir la parfaite petite-amie…

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L’ombre du vent

Roman de Carlos Ruiz Zafon.

Daniel est encore un enfant quand son père l’emmène au Cimetière des Livres. Là, il adopte un livre. Un livre de Julien Carax. Dès lors, toute son existence est vouée à la découverte de cet auteur. Quelle est son histoire ? Qui est l’homme qui détruit tous les livres de Carax ? Daniel retrace une vie dans la Barcelone de la guerre d’Espagne, à ses risques et périls.

Une grande réussite ! Une enquête au cœur même de la littérature, mâtinée d’un peu de surnaturel. L’intrigue est haletante, les personnages sont admirablement écrits. Je n’ose pas en dire trop! Pas question de dévoiler les arcanes de ce texte aux futurs lecteurs !

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C’est fou, une fille

Roman de Marie Billetdoux.

Un homme et une femme se réveillent un matin, nus dans le cabinet d’architecte de la femme. Ils ont connu une expérience sensuelle bouleversante. Ils ont redécouvert le plaisir de l’amour et le plaisir de donner. Hélas, le fragile moment de complicité parfaite qui suit l’amour ne peut durer. La réalité revient toujours, brutale et crue. À la lueur du matin, il y a des vérités qui font mal.

Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas vécu une telle expérience de lecture. Le style est sensuel, c’est du plaisir et de l’émotion à chaque mot. Le texte est court, vif et ciselé. À découvrir sans aucun doute!

En voici un extrait: Tout, j’aime tout de toi, même ce que tu n’aimes pas de toi, je l’aime… Je désespérais de rencontrer une femme comme toi, avant toi j’étais mort, j’étais en train de mourir, c’est une femme comme toi que je veux, avec toi tout est différent, je t’attendais, je t’aime, j’ai envie de toi, j’ai besoin de toi, j’ai besoin de toi pour toujours, c’est fou la force que tu dégages, tu rayonnes, tu rayonnes littéralement, aucune femme avant toi ne m’avait fait cet effet-là, avec toi, c’est incroyable, je m’aime, j’ai tellement de mal à croire qu’on puisse m’aimer, il y a de la lumière, de la grandeur en toi, tu me plais, tu me rends à moi-même, je n’imaginais pas que tu pouvais être aussi douce, avec toi je suis moi, avec toi, je peux être moi, j’ai toujours cru que je n’étais pas aimable, personne n’a su, comme toi, accéder à mon intimité, une seule, une fois, peut-être, mais je ne l’aimais pas, c’est une comme toi que j’espérais, je ne veux pas passer à côté d’une femme telle que toi, je ne veux jamais te perdre, je t’aime partout, je t’aime en entier et pour toujours, tu peux faire de moi ce que tu veux, tu es une grande dame, rien ne pourra entamer un amour comme celui que je ressens, je me connais, c’est la première fois que j’aime vraiment, je n’ai jamais aimé quelqu’un comme ça, je t’aime, je suis à toi, […]

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Contre-enquête sur la mort d’Emma Bovary

Roman de Philippe Doumenc.

En expirant, Emma laisse échapper qu’on l’a assassinée. Rémi, un enquêteur fraîchement envoyé de Rouen, va devoir trouver qui serait le meurtrier, si meurtre il y a eu. Chacun s’accuse, puis se rétracte. Les témoignages s’annulent ou se contredisent. Sans cesse, Rémi se trouve dans une impasse.

Voilà un texte ambitieux! Quand j’ai aperçu la couverture et le titre en librairie, je me suis demandé quel impudent osait s’attaquait au chef-d’œuvre de Flaubert, que j’ai bien dû lire une dizaine de fois! D’abord sceptique et craintive, je me suis laissée prendre au jeu. La mort d’Emma Bovary est traitée comme un fait divers, et devient le prétexte à une nouvelle histoire, avec de bons personnages et une trame solide. Ce roman est une grande réussite. Il ne se pose pas comme une suite au texte de Flaubert, mais réellement comme un nouveau roman, avec sa propre forme et son style. Je le recommande aux amateurs de classiques! Ce livre est en passe d’en devenir un !

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Dernier amour / Un soir au club

Romans de Christian Gailly.

Dernier amour – Paul Cédrat va mourir. C’est une question de jours. À Zürich, son œuvre est huée, entre cette de Haynd et de Beethoven. À la veille de s’éteindre, il rencontre une femme mystérieuse, celle qui sera son dernier amour.

Un soir au club – Simon Nardis a arrêté de jouer du jazz en cessant de boire. Il mène une vie rangée d’époux fidèle et écoute de la musique classique. Mais il suffit de si peu, d’un peu de hasard, pour que la fièvre du jazz le reprenne. Et la fièvre de l’amour aussi, avec Debbie. Une soirée et une journée suffisent pour que tout s’enchaîne, trop vite, comme un swing endiablé.

Comme avec tous les textes de Christian Gailly, il est toujours criminel et dangereux d’en dire trop. Il y a toujours de la musique, des femmes, des clubs de jazz et des destinées sublimées. J’ai lu les deux romans l’un à la suite de l’autre, et j’y ai trouvé une cohérence narrative très intéressante, comme une mélodie qui s’enchaîne…

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Les droits imprescriptibles du lecteur

Extrait de Comme un roman de Daniel Pennac.

  1. Le droit de ne pas lire.
  2. Le droit de sauter des pages.
  3. Le droit de ne pas finir un livre.
  4. Le droit de relire.
  5. Le droit de lire n’importe quoi.
  6. Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible).
  7. Le droit de lire n’importe où.
  8. Le droit de grapiller.
  9. Le droit de lire à haute voix.
  10. Le droit de nous taire.
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Rêve d’ailleurs

Roman de Luanne Rice.

Daisy a quitté le Wyoming à la mort de son fils Jake, emmenant avec elle la jumelle de l’enfant perdu, Sage. Pendant 16 ans, dans le Connecticut, elle a essayé de refaire sa vie et d’offrir une existence sécurisée à sa fille. Mais Sage a grandi sans la présence de son père, et elle veut désormais le retrouver et renouer avec ses origines. Elle part dans le Wyoming. Pour Daisy, c’est un retour sur les lieux du drame, les lieux de son premier amour avec James, le père de ses enfants.

Sympathique histoire sur fond de road-movie. Pas vraiment de profondeur, mais il est appréciable de se plonger dans un livre « facile » de temps en temps.

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L’assommoir

Roman d’Émile Zola.

Gervaise se retrouve seule avec ses deux enfants quand Lantier la quitte. Elle accepte d’épouser Coupeau, un brave ouvrier zingueur. Gervaise ouvre de son côté une boutique de blanchisserie qui gagne rapidement en renommée tant le travail des ouvrières est de qualité. Mais après un accident qui le prive de son emploi, Coupeau commence à boire et mène le ménage à la ruine, pendant que Lantier, de retour, profite des largesses de la maison.

Du grand Zola ! Je suis définitivement séduite ! Tout ce qu’écrit Zola, c’est du plaisir ligne après ligne!

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Les Amants de la Mer Rouge

Roman de Sulaiman Addonia.

Nasser a quitté son pays en guerre pour vivre en Arabie Saoudite. Dans la ville de Djeddah, il lave des voitures pour gagner sa vie. Pour Nasser, le quotidien est en noir et blanc. Le blanc, c’est la couleur du vêtement des hommes qui se pressent sur le chemin de la mosquée. Le noir, c’est la couleur de la robe des femmes, ensevelies sous le tissu, retranchées du monde et soumises à toutes les suspicions. Dans cet univers, les hommes assoiffés de désir ont l’habitude de s’attacher les services de jeunes garçons pour attendre jusqu’au mariage. Lassé de cette existence, Nasser ne peut cependant rien faire pour y échapper. Du moins le croit-il. Un jour, il reçoit un message d’amour d’une inconnue. Le geste même de cette femme est sacrilège. Nasser décide de braver tous les interdits, les chefs religieux et la police des mœurs. Prêt à tout, il sacrifie sa sécurité pour vivre pleinement la passion qui s’offre à lui.

Voilà un texte puissant. Chaque page est pleine d’une sensualité sauvage, mais aussi d’une frustration terrible. L’auteur a décrit avec talent le quotidien des musulmans dans l’Arabie Saoudite des années 80. Chaque lettre échangée entre le héros et son habibi (son amour) vibre d’une poésie digne du Cantique des Cantiques. La fin du livre, que je me garderai bien de révéler, est empreinte d’espoir pour tous les amants. Il n’y a pas d’amour impossible, ni de passion inutile. Tel est le message de l’auteur. Voilà un livre qui va circuler dans mon entourage!

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La vague

Roman de Todd Strasser.

En 1969, dans un lycée américain, Ben Ross, professeur d’histoire, lance une expérience inédite dans sa classe. Pour aider ses élèves à comprendre les mécanismes du nazisme et le comportement des Allemands sous le Troisième Reich, il crée un mouvement au slogan puissant: « La Force par la Discipline, la Force par la Communauté, la Force par l’Action. » Très vite, le professeur est entièrement pris par son personnage et par le mouvement qu’il a créé. Ses élèves se plient aux règles et en édictent de nouvelles. Ils abandonnent leur libre arbitre et leur sens critique pour ne se consacrer qu’au développement de la Vague. Le lycée californien devient un microcosme totalitaire qui inquiète les parents des élèves et les autres professeurs. Et des incidents tendent à prouver que Ben Ross ne maîtrise plus du tout son expérience historique.

Ce fait divers romancé ne brille pas par sa grande qualité littéraire. La langue est sommaire, les personnages à peine esquissés. Mais ce texte court relate bien ce qui a lieu dans ce lycée de Californie. Voici un texte à lire au même titre que les récits des déportés. Il témoigne que l’horreur peut très vite refaire surface et il rappelle que la vigilance est de mise, même des années après l’Holocauste.

Le film éponyme de Dennis Gansel est une excellente adaptation de ce livre.

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La dame à la lampe

Roman de Gilbert Sinoué.

Au 18° siècle, de l’Angleterre à la Crimée et son mortel conflit, Florence Nightingale a révolutionné le métier d’infirmière. De cette profession traditionnellement réservée à la lie de la société féminine, elle a fait un métier d’honneur et de dévouement, avec des règles de conduite et une formation. Connue pour ses crises de mysticisme, son exigence et son intransigeance, celle qu’on a surnommé la Dame à la lampe s’attire les foudres de certains dirigeants, mais aussi le soutien de la reine Victoria. Les malades l’attendent, l’espèrent. Les autres infirmières craignent son humeur changeante. Entière dans son engagement auprès des malades, infatigable dans son combat pour l’hygiène, elle obtient ce qu’elle veut à force de ténacité. A sa mort, Jonathan Brink, journaliste américain, entreprend d’écrire la vie de cette femme exceptionnelle, d’après les témoignages de ceux qui l’ont le mieux connue.

Si le sujet est intéressant, le traitement qui en est fait est loin d’être abouti. Et c’est bien dommage. Le personnage historique qu’est Florence Nightingale méritait une meilleure reconnaissance. Le texte se compose d’extraits des notes du « rossignol », de témoignages de ses proches, d’articles de journaux, le tout lié dans une narration anonyme. Il y a un manque certain de fluidité d’un chapitre à l’autre. On nous renvoie dès les premières pages aux notes en fin de livre. Mais certaines notes de bas de page m’ont laissé à penser que même le traitement chez l’imprimeur laissait à désirer. Dommage, car ce sujet a tout pour me plaire. Ce personnage féminin exemplaire n’est pas sans me rappeler celui que Pauline Gill a mis en avant dans son roman Docteure Irma, la première femme médecin canadienne.

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Roman

Texte d’Onuma Nemon.

Impossible de dire de quoi traite ce texte. J’ai abandonné après quarante pages. Sans mots vulgaires ou termes choquants, la narration est violente, la façon même d’utiliser la langue est agressive. L’impression qui me reste après quelques pages, c’est l’oppression. Il est rarissime que j’abandonne un livre avant la fin, sans lui donner sa chance, sauf quand il me fait peur…

Si certains l’ont lu, je veux bien leurs avis et commentaires.

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Terre des oublis

Roman de Duong Thu Huong.

Miên est une femme chanceuse: son mari Hoan est un riche planteur de la région du Hameau de la Montagne, leur fils Hahn est un beau petit garçon. Leur vie bascule le jour où le premier mari de Miên revient au village. Disparu depuis 14 ans, déclaré mort après la guerre qui a opposé le pays à la France, puis aux États-Unis, Bôn a traversé le pays, s’est perdu et porte en lui les marques d’une souffrance humaine incompréhensible. Bôn veut retrouver la femme pour laquelle il a tenu toutes ses années, il veut la vie de couple et la famille dont la guerre l’a privé. Pour satisfaire à l’honneur et aux codes traditionnels, Miên sacrifie son bonheur, son fils et son amour pour Hoan pour revenir auprès de l’homme qu’elle n’aime plus. Durant des mois, elle endure la misère et l’humiliation. Bôn est trop faible pour défricher une terre, pour tenir un métier. Seule, elle subvient aux besoins du couple grâce à l’argent que Hoan a mis à sa disposition. Bôn le sait, il ne peut pas lutter contre cet homme fort auquel son épouse ne cesse de penser. La seule issue pour lui est d’avoir un enfant de Miên, un enfant pour cimenter leur couple.

Une superbe peinture humaine! L’histoire de chacun des trois personnages est peu à peu dévoilée. On découvre les blessures secrètes qui ont construit chaque destinée. Au travers de ces existences particulières, c’est le Viet Nam qui est mis à l’honneur. Tout un monde de senteurs et de saveurs s’expose au fil des pages. Les paysages se découpent sous la plume de l’auteur. La traduction est riche, elle préserve l’ampleur des phrases.

À découvrir sans aucun doute !

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Le sabre des Takeda

Roman d’Inoue Yasushi, traduit par Marie-Noëlle Shinkai-Ouvray.

Au 17° siècle, les seigneurs japonais vivent de conquêtes et de batailles pour étendre leurs territoires respectifs. La ruse et la stratégie sont au cœur de ces conflits où la violence et le courage poussent les hommes à des exploits extraordinaires. Une figure se détache, celle de Yamamoto Kansuké, un général borgne et boiteux marqué de nombreuses cicatrices. Cet homme est le stratège du clan Takeda. Son génie en fait l’arme secrète de la maison Takeda. Il nourrit un rêve, celui de l’unité du Japon. D’alliances en batailles, il met en œuvre son plan, pour la gloire de son maître et de la concubine de celui-ci, la belle princesse Yubu.

Pfiou ! Que de souffle et d’endurance il faut pour venir à bout de ce livre ! Les longueurs qui s’accumulent sont à peine rattrapées par les pages d’intense action. Et il manque un index pour les termes exotiques! Tout le monde n’est pas diplômé de culture nippone! Cela dit, le roman est une belle fresque et le personnage de Kansuke est bien décrit.

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Alabama Song

Roman de Gilles Leroy. Prix Goncourt 2007.

Zelda Sayre, une Southern Belle des plus célèbres, épouse le très jeune lieutenant Fitzgerald. Agés d’à peine 20 ans chacun, ils sont propulsés sous les feux de la célébrité. Très vite, Zelda devient l’ombre et le faire-valoir de son époux, qui se sert sans vergogne dans les écrits de son épouse pour nourrir sa propre création. Rongés d’alcool, de drogues et par une vie nocturne épuisante, les époux Fitzgerald n’alimentent plus que la presse à scandale. D’Amérique en Europe, ils laissent dans leur sillage des drames et des déchirures. Maintes fois internée, soumise aux traitements expérimentaux les plus hasardeux, Zelda sait que son époux fait tout pour la garder à sa merci.

J’étais dans le clan Claudel, pour son Rapport de Brodeck, en 2007. J’ai donc longtemps boudé le texte de Gilles Leroy. Mais je ne regrette pas de l’avoir ouvert. L’histoire de Zelda Sayre Fitzgerald, revue et romancée par l’auteur est superbe. Le mélange des époques, des débuts de l’histoire du couple aux déboires qu’il rencontre, permet un beau voyage dans les Années Folles et l’Après-Guerre. Je le recommande sans aucun doute.

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La révolte des accents

Roman d’Erik Orsenna.

Grâce à sa vue d’exception, Jeanne décroche un job d’été pas comme les autres: surveillance du port et des bateaux depuis les hauteurs du phare. Un soir, une jonque crée l’animation dans l’île. Après une représentation de Roméo et Juliette, les acteurs et la jonque quittent l’île. Et avec eux toutes les épices et tous les accents. Sur l’île, tout devient fade et incompréhensible. Jeanne décide de partir à la recherche des accents, pour les convaincre de se reposer sur les phrases.

Après La grammaire est une chanson douce et Les chevaliers du subjonctif, j’ai retrouvé avec plaisir Jeanne et son frère Thomas. Et toujours, cette petite saveur nostalgique. L’écriture est simple, l’histoire aussi. Et tout fonctionne à merveille. J’en redemande.

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La guerre de Troie n’aura pas lieu

Pièce de Jean Giraudoux.

Pâris a enlevé Hélène. Les Grecs demandent réparation. Mais Andromaque et Hector ne veulent plus la guerre, et sont prêts à perdre la face pour gagner la paix. Cassandre sait que l’inévitable est en marche.

Très bonne pièce, très caustique. Les répliques sont savoureuses et les personnages sont superbes, mais au plus fort de leur médiocrité. Facile à lire, j’aimerais beaucoup assister à une représentation de cette pièce.

Une réplique d’Hélène, dans la scène 8 de l’acte I, m’a marquée : « Je n’aime pas beaucoup connaître les sentiments des autres. Rien ne gêne comme cela. C’est comme au jeu quand on voit le jeu de l’adversaire. On est sur de perdre. » Quel cynisme !

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Moi, Tituba sorcière

Roman de Maryse Condé.

Tituba est né à la Barbade. Sa mère, esclave, a été pendue pour avoir défendu sa vie contre un blanc. Orpheline, Tituba est solitaire. Sa rencontre avec John Indien bouleverse son existence. Avec lui, elle arrive à Boston, au service d’un nouveau maître, le pasteur Parris. Puis à Salem, elle est accusée de sorcellerie. Finalement amnistiée, elle retrouve sa Barbade natale et participe aux premières révoltes des nègres marrons.

Les écrits de Maryse Condé me séduisent sans aucun doute! Cet autre texte, ancré dans le passé lourd et obscur des esclaves créoles, est puissant comme un charme vaudou. Je me suis laissée entraînée dans les aventures de la pauvre Tituba, et j’ai découvert le procès des sorcières de Salem sous un autre angle. A tous ceux qui aiment les histoires sensées, mais teintées d’un peu de mystère, je recommande cet autre texte de Maryse Condé.

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Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part

Recueil de nouvelles d’Anna Gavalda.

Je ne ferai pas le détail de chaque histoire. Ce que j’aime avec les nouvelles, c’est qu’on peut en manger à tous les repas, sans craindre l’indigestion.  L’auteure tape dans les sujets classiques mais efficaces: l’amour, la séduction, la vengeance, la culpabilité, le doute existentiel…

Ça se lit très vite, très bien, c’est drôle, effrayant, édifiant… mais ça s’oublie vite !

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Les Naufragés de l’île Tromelin

Roman historique – documentaire d’Irène Frain.

L’Utile, vaisseau français fait naufrage aux abords de l’Ile des sables, réputée pour son récif corallien très dangereux. À son bord, un équipage français et une cargaison précieuse. Précieuse et illégale. Des esclaves noirs achetés à Madagascar. Les rescapés du naufrage comprennent vite que leur unique chance de survie est de quitter l’île au plus vite. Avec les débris de l’Utile, Blancs et Noirs construisent main dans la main un bateau pour s’enfuir. Mais le vaisseau est trop petit pour les embarquer tous. Le capitaine promet solennellement de revenir chercher les esclaves. Quinze ans après, on retrouve l’île et huit survivants, sept femmes et un bébé. Que s’est-il passé sur cette île ? Pourquoi les autorités françaises ont-elles tout fait pour empêcher le sauvetage des esclaves ? Ce drame éveille les consciences, notamment celle de Condorcet qui commencera sa lutte pour l’abolition de l’esclavage.

Dès le début, j’ai été décontenancée. Le personnage principal semble d’abord être l’île. Puis il semble qu’elle soit remplacée par le naufrage, lui-même supplantée par la survie sur l’île. Très difficile d’identifier la voix narratrice. On sait qu’elle se fonde sur des documents d’époque, mais elle semble polymorphe. Tantôt il semble que c’est l’écrivain de bord qui relate ce récit, tantôt on croit entendre le capitaine, ou bien un autre officier. Ce texte oscille entre documentaire et roman historique. Mais pour être le premier, il lui manque la précision des citations et des relevés. Et pour être pleinement le second, il lui manque le romanesque et les dialogues. Il est d’ailleurs assez pénible de voir s’enchaîner les descriptions et les analyses mentales des protagonistes sans que jamais une parole ne soit échangée. C’est un texte intéressant, mais qui manque de cohérence. Il est dommage que l’auteure n’ait pas pleinement assumé un genre, car il m’est très difficile au final de définir si j’ai aimé ou non ce livre. Je suis à la fois déçue par le documentaire et frustrée par le roman. Néanmoins, ce texte a pour lui de révéler le plus clairement possible un fait historique vraiment méconnu en tentant de réparer les erreurs et les fausses idées.

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L’araigne

Roman d’Henri Troyat.

Gérard Fonsèque est un vieux garçon, qui vit dans l’appartement familial entre sa mère et ses trois sœurs. Quand Luce se marie avec Paul Aucoc, Gérard sent qu’il perd de son emprise sur son entourage. Du fond de sa chambre, retranché dans sa chambre sombre, il rumine des plans tortueux pour garder ses sœurs et sa mère auprès de lui. Prêt à tout pour faire échouer le mariage de sa sœur Élisabeth, il ment, déforme la vérité. Et quand il apprend que Marie-Claude, la dernière à ne pas avoir quitté le nid, s’apprête à défaire ses liens, il  invente un stratagème odieux pour retenir toute l’attention.

Excellent comme toujours ! Henri Troyat sait dépeindre la complexité et la bassesse humaine avec un cynisme délicieux ! Je le recommande, et je n’en dis pas plus pour laisser le plaisir !

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La der des ders

Roman de Didier Daeninckx.

René Griffon est un ancien soldat, reconvertit en détective. Le colonel Fantin requiert ses services pour démasquer un maître chanteur. Griffon est vite pris par un jeu de faux-semblant.

Décidément, je n’aime pas les romans policiers. D’autant que celui-ci est tellement mal écrit que c’est une vraie douleur de supporter la langue et la syntaxe de l’auteur !

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Les enfants du jazz

Recueil de nouvelles de Francis Scott Fitzgerald.

L’auteur nous offre différents regards sur une époque qui change, les « Roaring twenties » ou « les années vingt rugissantes ». Le jazz s’impose. La vie n’est pas aisée mais chacun espère qu’elle le deviendra. Comme cet homme surmené qui, lassé d’entendre les récriminations de son épouse, l’endort pendant plusieurs jours pour pouvoir mener à bien son projet. Ou comme Benjamin Button, cet homme au destin extraordinaire: à sa naissance, il a l’apparence et la sagesse d’un vieillard. Sa vie ne sera qu’un retour à l’enfance, à l’innocence et à l’ignorance.

Chaque nouvelle est un petit trésor. Le jazz chante à chaque page et c’est un régal ! J’ai hâte de découvrir l’adaptation de David Fincher sur la nouvelle de Benjamin Button.

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Je pense à toi tous les jours

Chroniques d’Héléna Villovitch.

La narratrice évoque son emploi, ses jobs, son quotidien, ses maris, ses amis.

Quelle purge ! Une suite de considérations oiseuses sur des sujets traités par dessus l’épaule. Aucune cohérence dans le propos, un humour qui se veut caustique et qui vire au potache. Des photos en noir et blanc étranges, dont je me demande encore ce qu’elles ont à voir avec le texte. Une langue simpliste, une narration décousue. Heureusement que le texte est court ! Aucun intérêt…

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La Belle Créole

Roman de Maryse Condé.

Dieudonné est acquitté du meurtre de Loraine, son employeuse et sa maîtresse. Il est noir et pauvre, elle était riche et blanche. L’avocat plaide la rébellion du domestique humilié. Mais Dieudonné est inconsolable de la perte de celle qui a illuminé sa vie. Au cours d’une nuit, il retrace sa misérable histoire. Son récit est entrecoupé des aventures qui surviennent pendant sa promenade citadine nocturne. Sans cesse, de nouveaux personnages s’invitent avec leur existence et enrichissent le discours de Dieudonné.

Époustouflant ! Ce texte est riche de la polyphonie de tradition orale créole. A aucun moment, je n’ai été perdue. Il est facile de se retrouver dans la narration. La description de la société créole moderne est belle et transcrit avec fidélité tout un passé qui ne recule pas devant le progrès. Je le recommande sans aucun doute, avec enthousiasme même !

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Elle s’appelait Sarah

Roman de Tatiana de Rosnay.

Julia Jarmond est chargée par son directeur d’écrire un article sur la rafle du Vel d’Hiv. Très vite, elle s’investit corps et âme dans les recherches, découvrant l’horreur des arrestations, la séquestration dans le grand stade couvert, la première déportation jusqu’aux camps de Pithiviers et Beaune-la-Rolande, la séparation des familles, le départ pour Auschwitz. Elle découvre que sa belle-famille est de très près liée à ce moment douloureux de l’histoire française. Julia part à la recherche de Sarah Starzynski, une fillette de 10 ans. Et elle néglige son époux et son mariage.

C’est une belle histoire. La construction des premiers chapitres est intéressante. On navigue entre deux époques: juillet 1942 et juillet 2002. La deuxième moitié du roman est une enquête sur les traces de la petite Sarah. J’ai trouvé quelques essoufflements par moments, mais dans l’ensemble le texte est bien écrit et facile à suivre.

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Fleur de Neige

Roman de Lisa See.

Fleur de Lis et Fleur de Neige sont nées le même jour de la même année. Fleur de Neige est issue d’une famille noble, tandis que Fleur de Lis a été élevée dans la misère. Mais Fleur de Lis a un destin particulier: la perfection de ses pieds bandés et son exceptionnelle beauté lui permettent de devenir la laotong – l’âme sœur – de Fleur de Neige. Pendant des années, les deux jeunes filles, puis les femmes qu’elles deviennent, grandissent en échangeant leur savoir. Fleur de Neige apprend à son amie le raffinement, la bonne tenue et le nu shu, la langue secrète des femmes. Fleur de Lis enseigne à son âme sœur les travaux ménagers. Quand vient le temps de leur mariage, Fleur de Lis est comblée par une belle-famille aisée et en vue. Mais Fleur de Neige connait un destin plus sombre. Pourtant l’amitié entre les deux femmes semblent résister aux épreuves du temps.  Jusqu’au jour où Fleur de Lis découvre la grande trahison de Fleur de Neige à son égard. La jalousie et la haine remplacent alors l’amour.

C’est une belle histoire. J’ai apprécié de découvrir les traditions de la Chine impériale du XIX° siècle, les coutumes familiales et la condition des femmes. Terrible découverte que les détails de la pratique du bandage des pieds des petites filles. La narration est simple, fluide. La voix de la narratrice est agréable à suivre, malgré quelques répétitions agaçantes, probablement dues à une mauvaise traduction. C’est une lecture facile et divertissante.

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Cent ans de solitude

Roman de Gabriel Garcia Marquez.

José Arcadio Buendia et sa femme Ursula ont traversé le pays pendant des mois avant de s’installer de l’autre côté du marigot. L’homme fonde Macondo, une ville nouvelle que la mort n’a pas encore visité. Des débuts de la petite cité à sa décadence, on suit le destin de la famille Buendia, de ses innombrables enfants, ses garçons têtus et entrepreneurs, ses filles belles comme le jour. Les mariages se succèdent, les adultères aussi. Certaines filiations se perdent dans l’oubli, d’autres ne sont jamais découvertes et certaines unions semblent contre-nature. Pendant des décennies, Ursula règne en matrone sur la famille et assiste aux folies de ses enfants. À chaque naissance, on craint toujours que les bébés naissent avec des queues de cochon, signe d’une alliance incestueuse. L’histoire du pays influe sur le village, qui se déchire entre conservateurs et libéraux. Sous le joug de la malédiction de Mélquiadès, la famille Buendia et son innombrable descendance sont prisonnières de Macondo, pour un siècle entier.

Il ne faut surtout pas décrocher d’une ligne ! Tous les personnages ont des noms si similaires qu’il est simple de se perdre dans le dédale de la généalogie des Buendia. Cette œuvre fondatrice du réalisme magique est magistrale, l’humour est caustique et le destin des personnages est atypique. La narration est audacieuse, qui nivelle les époques : il semble que tout se passe en même temps alors que les personnages vieillissent et changent. À lire avec attention, mais aussi avec humour.

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Enfance

Autobiographie de Nathalie Sarraute.

L’auteure écrit son enfance sous forme de dialogue. Son double la corrige et nuance chacun de ses souvenirs. Elle raconte la Russie et Paris, sa mère et son père séparés, la nouvelle femme de celui-ci et leur bébé, sa passion pour l’école et tous ses plaisirs. De souvenirs en évocations, on voit se dessiner le portait d’une petite fille qui porte en elle toutes les réussites de l’adulte.

Moi qui suis souvent mauvais public des autobiographies, je dois dire que celle-ci m’a bouleversée. La prouesse de l’auteure est d’utiliser une voix d’enfant sans tomber dans la mièvrerie. Le travail correctif mené à chaque avancée du texte est très intéressant. L’auteure sacrifie vraiment au doute de l’autobiographe: faut-il considérer chaque souvenir pour acquis? Les souvenirs sont-ils réels ou transmis? En toute sincérité, Nathalie Sarraute réécrit son histoire. Son œuvre se lit très facilement et est vraiment touchante.

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